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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 2, 1838.djvu/286

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— Le général ! dit Seelen Cooper fort embarrassé… Vous informerez le général !… Oui… de l’état de sa santé. Mais vous ne répéterez rien de ce qu’il peut avoir dit dans ses accès de délire. Par mes yeux ! si vous écoutez ce que disent des fiévreux dont le cerveau est dérangé, votre dos se brisera bientôt sous le poids de leurs histoires, car je vous réponds que vous en aurez bon nombre à porter.

— Capitaine Seelen Cooper, dit le docteur, je ne me mêle point de votre département dans l’hôpital, je désire que vous ne preniez pas la peine de vous occuper du mien. Je suppose, puisque j’ai une commission dans le service, et de plus un diplôme régulier comme médecin, que je connais quand mon malade est ou n’est pas en délire. Veillez donc à ce qu’on soigne convenablement cet homme, à vos risques et périls. »

À ces mots, il quitta l’hôpital, mais non sans avoir, sous prétexte de consulter encore son pouls, pressé la main du malade, comme pour l’assurer de nouveau qu’il ferait tous ses efforts pour sa délivrance.

« Par mes yeux ! murmura Seelen Cooper, le jeune coq chante bravement pour venir d’un poulailler écossais ; mais je saurais bien comment m’y prendre pour renverser ce blanc-bec du perchoir, s’il n’avait pas guéri tous les marmots du général. »

Il en parvint assez à l’oreille de Richard, pour qu’il conçût l’espérance de se tirer d’affaire, et cette espérance augmenta bientôt lorsqu’il se vit transporté dans une salle particulière, endroit beaucoup plus décent, et seulement habité par deux malades, qui avaient l’air d’officiers subalternes. Quoique sentant bien qu’il n’avait d’autre incommodité que cette faiblesse qui succède à une violente agitation, il crut prudent de se laisser encore traiter comme malade, vu qu’il resterait ainsi sous la surveillance de son camarade. Néanmoins tandis qu’il se préparait à profiter des bons offices de Hartley, la réflexion qui lui venait le plus souvent à l’esprit était encore inspirée par l’ingratitude. « Le ciel ne pouvait-il donc me sauver que par les mains de l’être qui m’est le plus odieux sur la surface de la terre ? »

Pendant ce temps-là, ignorant l’ingratitude de son ancien camarade, et, à vrai dire, ne songeant guère aux sentiments que celui-ci pouvait éprouver à son égard, Hartley s’occupait de lui rendre service autant qu’il était en son pouvoir, sans songer à rien autre chose qu’à l’accomplissement de son devoir d’homme et de