Aller au contenu

Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/154

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de sa position précaire. Il s’avança donc vers elle avec des paroles de salutations sur les lèvres, et il levait déjà les bras pour la descendre de son piédestal, qui était haut d’environ six pieds ; mais la légère et active étrangère n’accepta que le secours de sa main, et sauta lestement sur le plancher, sans plus paraître y faire attention que si elle eût été formée du léger duvet des plantes. Ce fut seulement, à vrai dire, par la pression momentanée de sa petite main que le baron d’Arnheim reconnut qu’il avait affaire à un être de chair et d’os.

« Je suis venue suivant l’ordre qu’on m’a donné, » dit-elle en promenant ses regards autour de la chambre ; « vous pouvez compter sur une maîtresse active et diligente, et j’espère être assez heureuse pour rencontrer un élève attentif. »

« Après l’arrivée de cet être bizarre et intéressant au château d’Arnheim, divers changements eurent lieu dans l’intérieur de la maison. Une dame de haut rang, mais de médiocre fortune, la respectable veuve d’un comte de l’empire, qui était parente du baron, reçut et accepta une invitation de venir présider aux affaires domestiques de son cousin, et éloigna par sa présence tous les soupçons qu’aurait pu faire naître le séjour d’Hermione dans son manoir, car c’est ainsi que la belle Persane était généralement appelée.

« La comtesse de Waldstetten poussait la complaisance si loin, qu’elle ne s’absentait presque jamais, soit de la bibliothèque, soit du laboratoire, quand le baron d’Arnheim prenait sa leçon ou poursuivait quelque étude avec la jeune et belle institutrice qui avait été si étrangement substituée au vieux mage. Si le rapport de cette dame mérite foi, leurs travaux étaient d’une nature très extraordinaire, et les résultats qu’elle voyait souvent obtenir pouvaient aussi bien produire la frayeur que l’étonnement ; mais elle les défendait énergiquement du reproche de pratiquer des arts illicites ou de dépasser les bornes de la science naturelle.

« Un meilleur juge en pareille matière, l’évêque de Bamberg lui-même, fît une visite à Arnheim dans l’intention de s’assurer d’une science qui faisait tant de bruit dans tous les pays qu’arrose le Rhin. Il conversa avec Hermione, et la trouva si parfaitement instruite des vérités de la religion, si bien imbue de ses doctrines, qu’il la compara à un docteur en théologie sous le costume d’une danseuse orientale. Quand on interrogea l’évêque sur les connaissances d’Hermione dans les langues et les sciences, il répondit qu’il avait été attiré à Arnheim par les rapports les plus extravagants sous ce