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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/329

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que épuisées, et la condition de ses sujets, quoique appauvris par des taxes et des tailles, lui permettraient de faire à votre égard. — L’hypocrite à double face ! dit Marguerite. Si l’assistance du prince de Bourgogne nous fournit une chance de reconquérir ce qui nous appartient, alors il nous donnera quelques méchantes couronnes pour que nous oubliions, dans notre prospérité nouvelle, son indifférence pour notre adversité… Mais que fera Bourgogne ? Je suis venue ici pour vous dire ce que j’ai appris, et savoir le résultat de vos démarches… une garde dévouée protège le secret de notre entrevue. Mon impatience de vous voir m’a amenée ici sous ce vil déguisement. J’ai une petite suite à un couvent un peu au delà de cette ville… J’ai fait épier votre arrivée par le fidèle Lambert… et maintenant je viens savoir vos espérances ou vos craintes, et vous faire part des miennes. — Royale dame, dit le comte, je n’ai pas vu le duc. Vous savez que son caractère est capricieux, bourru, hautain et inexorable : s’il peut adopter la politique calme et soutenue que demandent les circonstances, je doute peu qu’il n’obtienne réparation complète de Louis son ennemi juré, et même d’Édouard son ambitieux beau-père ; mais il s’abandonne à d’extravagants accès de colère, avec ou sans provocation ; il peut s’engager dans une querelle avec les pauvres mais courageux Helvétiens, et vraisemblablement il allumera une guerre où il doit s’attendre à ne rien gagner, tandis qu’il court les plus grands risques de beaucoup perdre. — Assurément, dit la reine, il ne se fiera point à l’usurpateur Édouard, au moment même où cet usurpateur lui donne la plus grande preuve de trahison. — Sous quel rapport, madame ? La nouvelle dont vous parlez n’est pas encore venue jusqu’à moi. — Comment, milord ? suis-je donc la première à vous annoncer qu’Édouard d’York a passé la mer avec une armée telle que le fameux Henri V lui-même, mon beau-père, n’en transporta jamais une semblable de France en Italie. — En effet, j’avais entendu dire que tel était son dessein, et j’en avais prévu la mise à exécution comme fatale à notre cause. — Édouard est arrivé, Édouard le traître et l’usurpateur. Il a envoyé un défi à Louis de France, réclamant la couronne de ce royaume comme sa légitime propriété… Cette couronne qui fut placée sur la tête de mon malheureux mari, lorsqu’il n’était encore qu’un enfant au berceau. — Il est donc décidé… les Anglais sont en France ! » répliqua Oxford d’un ton qui exprimait la plus vive inquiétude… « Et quels sont ceux qu’Édouard amène avec lui pour cette expédition ? — Tous les ennemis les plus