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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 21, 1838.djvu/368

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même causée par la colère du duc ne put réprimer, parcourut l’auditoire ; et le bourgeois de Dijon, intrépide plébéien, répliqua avec peu de respect : « Nos bourses, monseigneur duc, nous appartiennent ; et nous n’en mettrons pas les cordons entre vos mains avant d’être satisfaits des motifs pour lesquels notre argent doit être dépensé ; et nous savons bien comment protéger nos fortunes et nos personnes contre des bandits et des pillards étrangers. »

Charles fut sur le point d’ordonner l’arrestation du député ; mais jetant un coup d’œil vers le comte d’Oxford, dont la présence, en dépit de lui-même, lui imposait un certain degré de contrainte, il renonça à cette imprudence pour en commettre une autre.

« Je vois, » dit-il en s’adressant à la députation des États, « que vous avez tous formé une ligue pour déconcerter mes projets, et sans doute pour m’ôter tout pouvoir, sauf celui de porter une couronne de souverain et d’être servi à genoux, comme Charles-le-Simple, pendant que les États de mon royaume se partagent la puissance. Mais vous saurez que vous avez affaire à Charles de Bourgogne, prince qui, bien que dédaignant de vous consulter, est certainement capable de gagner des batailles sans l’aide de ses nobles, puisqu’ils lui refusent l’assistance de leurs épées… de subvenir aux dépenses sans le secours de ses avares bourgeois… et peut-être de trouver un chemin vers le ciel sans l’assistance d’un clergé ingrat. Je montrerai à tous ici présents combien mon esprit est peu affecté et ma résolution peu ébranlée par votre séditieuse réplique au message dont je vous ai honorés… Ici, Toison-d’Or, admettez en notre présence ces hommes des cantons et des villes confédérées de la Suisse, comme ils s’appellent. »

Oxford et tous ceux qui s’intéressaient réellement au bonheur du duc entendirent avec la plus vive inquiétude sa résolution de donner audience aux envoyés suisses, prévenu comme il l’était contre eux, et dans un moment où sa bile était on ne peut plus remuée par le refus des États de lui accorder des subsides. Ils n’ignoraient pas que les obstacles qui s’opposaient au cours de sa colère étaient comme des rocs dans le lit d’un fleuve dont le courant ne peut être interrompu, mais dont ils provoquent les eaux à se couvrir d’écume. Tous voyaient que le dé en était jeté ; mais il aurait fallu être doué d’une prescience plus qu’humaine pour imaginer les conséquences qui pouvaient résulter d’une pareille détermination. Oxford en particulier reconnaissait que l’exécution de son plan d’une descente en Angleterre était le point principal que compromettait le duc dans