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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/157

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garde d’approcher du château, et attendirent que quelque aventurier hardi vînt occasionner cet heureux réveil que les paroles du magicien avaient semblé annoncer.

« Jamais on n’eut plus de motifs d’espérer que ce réveil aurait lieu que lorsque le pas hardi d’Artavan de Hautlieu retentit dans les cours du palais enchanté. À gauche, s’élevaient le palais et le donjon ; mais la droite, plus attrayante, semblait inviter à entrer dans l’appartement des femmes. Près d’une porte latérale, et à demi couchés sur un sopha, deux gardes du harem, leurs sabres nus à la main, et les traits horriblement contournés, soit par le sommeil, soit par la mort, semblaient menacer les jours de quiconque oserait approcher. Cette menace n’effraya point Artavan de Hautlieu. Il se dirigea vers la porte, et les battants, comme ceux de la grande porte du château, s’ouvrirent d’eux-mêmes. Il pénétra dans un corps-de-garde rempli de soldats du même genre, et le plus strict examen ne put lui faire découvrir si c’était le sommeil ou la mort qui glaçait tous les yeux, dont l’expression semblait pourtant lui défendre d’avancer. Ne s’inquiétant pas de la présence de ces lugubres sentinelles, Artavan entra dans un appartement intérieur où des esclaves de la plus exquise beauté étaient déjà revêtues de leur costume de nuit. Il y avait dans ce spectacle de quoi arrêter un aussi jeune pèlerin qu’Artavan de Hautlieu ; mais il avait à cœur de rendre la liberté à la belle princesse, et il ne se laissa détourner de ce dessein par aucune considération inférieure. Il passa donc, et se dirigea vers une petite porte d’ivoire qui, après un moment d’attente, comme par une pudeur de jeune fille, s’ouvrit de même que les autres, et donna accès dans la chambre à coucher de la princesse elle-même. Une douce lumière, semblable à celle du soir, pénétrait dans une chambre où toute chose semblait préparée pour augmenter les délices du sommeil. Le monceau de coussins qui formaient un lit magnifique semblait plutôt touché que pressé par le corps d’une nymphe de quinze ans, la célèbre princesse de Zulichium. »

« Sans vous interrompre, bon père, dit la comtesse Brenhilda, il me semble que nous pouvons fort bien nous représenter une femme endormie, sans que vous entriez dans beaucoup de détails, et qu’un tel sujet ne convient guère ni à votre âge ni au nôtre. — Pardonnez-moi, noble dame, répliqua Agelastès ; la partie la plus goûtée de mon histoire a toujours été ce passage, et si aujourd’hui je la supprime par obéissance à vos ordres, n’oubliez pas, je vous