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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/185

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si mon père a un officier assez brave pour favoriser un dessein si pieux et si raisonnable, il faut que l’empereur perde un allié sur la foi duquel il se reposait, ou un dévoué et fidèle soldat de sa garde, et qui s’est distingué en plusieurs occasions. — Je suis heureux d’apprendre que cet homme a une telle réputation. En effet, son ambition devait avoir quelque fondement. Plus je songe à cela, et plus je crois qu’il est généreux, et non dérogatoire, d’accorder à ce pauvre exilé, qui pense si noblement, ces privilèges dont quelques uns, nés dans un rang élevé, sont trop lâches pour profiter. Cependant, ne désespérez pas, noble princesse ; le cartel n’est pas encore accepté, et s’il l’était, l’issue est entre les mains de Dieu. Quant à moi, dont le métier est la guerre, la pensée que j’ai une affaire sérieuse à vider avec cet homme déterminé me détournera d’autres querelles moins honorables, dans lesquelles le manque d’occupation pourrait m’entraîner. »

La princesse ne fit point d’autre observation ; mais elle résolut de faire des remontrances en particulier à Achille Tatius, pour l’engager à prévenir un combat qui pourrait être fatal à l’un ou à l’autre de ces deux braves guerriers. La ville, qui se trouvait devant eux dans l’obscurité, étincelait cependant des nombreuses clartés qui éclairaient les maisons des habitants. La cavalcade impériale se dirigea vers la Porte-d’Or, où le fidèle centurion mit son poste sous les armes pour la recevoir.

« Il faut maintenant nous séparer, belle dame, » dit le comte, au moment où la société, ayant mis pied à terre, se trouvait réunie à l’entrée particulière du palais de Blaquernal ; « nous allons retrouver, comme nous le pourrons, les logements que nous avons occupés la nuit dernière. — Non pas, avec votre permission, dit l’impératrice. Il vous faut consentir à souper et à reposer dans des appartements plus convenables à votre rang ; votre quartier-maître sera une personne de la famille impériale, qui a été votre compagne de voyage. »

Le comte entendit cette invitation avec une forte tentation d’accepter l’hospitalité qui lui était offerte : quoique, font dévoué aux charmes de sa Brenhilda, l’idée seule de préférer la beauté d’une autre à la sienne ne lui fût jamais venue à la tête ; toutefois il s’était naturellement senti flatté des attentions d’une femme charmante de très haut rang ; et les éloges dont la princesse l’avait comblé n’étaient pas tout-à fait tombés à terre. Il n’était plus dans les dispositions où le matin l’avait trouvé, d’outrager les sentiments de l’em-