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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/243

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ments, je te demande pardon de l’injure que je viens de t’adresser. — Vous n’avez pas besoin de mon pardon : car je ne m’offense jamais d’un mot échappé sans intention sérieuse de m’offenser… Écoutez donc, ils parlent encore. »

« Il serait étrange que cela fût, » disait le césar en marchant à grands pas dans l’appartement ; « mais il me semble, Agelastès, et même je suis presque certain, que j’entends parler dans le voisinage de cet appartement que tu habites seul. — C’est impossible, répliqua Agelastès ; mais je vais aller voir. »

Le Varangien, qui le vit quitter le pavillon, fit comprendre au Franc qu’il fallait qu’ils se couchassent à terre au milieu du petit buisson d’arbres verts où ils étaient. Le philosophe fit sa ronde d’un pas bruyant, mais d’un œil soigneux ; et les deux écouteurs furent obligés d’observer le plus strict silence et de ne faire aucun mouvement, jusqu’à ce qu’il eût terminé son infructueuse recherche, et qu’il fût rentré dans le pavillon.

« Sur ma foi, brave homme, dit le comte, avant de retourner nous mettre aux écoutes, il faut que je te dise à l’oreille que jamais de ma vie je n’eus de tentation plus forte que celle qui me poussait à casser la tête de ce vieil hypocrite, si j’eusse pu le faire sans compromettre mon honneur ; et j’aurais souhaité du fond de mon cœur que toi, qui n’étais pas retenu par cette raison, tu eusses cédé à une impulsion de la même nature. — Une pareille idée m’a passé dans l’esprit ; mais le projet me sembla inexécutable, car je ne pouvais le réaliser sans compromettre notre sûreté à tous deux et particulièrement celle de la comtesse. — Je te remercie encore une fois de ta bienveillance pour elle ; et, par le ciel, si nous devons nous battre enfin, comme c’est assez probable, je ne te refuserai ni un honorable adversaire, ni un juste quartier si les chances du combat tournent contre toi. — Je te remercie ; seulement, pour l’amour du ciel, garde le silence maintenant, et fais ce que tu voudras ensuite. »

Avant que le Varangien et le comte eussent repris leur poste, les personnes qui causaient dans l’intérieur du pavillon, croyant n’être pas écoutées, avaient recommencé leur conversation, parlant bas, mais avec beaucoup de chaleur.

« C’est vainement que vous voudriez me persuader que vous ne savez pas où est mon mari, disait la comtesse, ou que vous n’avez pas l’influence la plus absolue sur sa captivité : quel autre pourrait avoir intérêt à écarter ou à mettre à mort le mari, sinon l’homme