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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/327

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je n’ai pas les moyens de m’opposer à votre volonté. Une fois en liberté, le libre exercice de ma valeur et de ma lance m’appartiendra de nouveau. — Soit, sire paladin, répliqua la princesse d’un ton très calme ; j’ai bonne espérance que ni l’une ni l’autre ne vous attireront querelle avec ces défie-diables de Paris, soit mâle, soit femelle, et que nous estimerons le point culminant de votre courage d’après la philosophie grecque et le jugement de notre bienheureuse Dame de Merci, et non de celle des Lances rompues. »

En ce moment, un coup frappé à la porte avec autorité troubla la consultation du césar et des deux dames.


CHAPITRE XXVII.

L’AVEUGLE.


Le Médecin. Rassurez vous, madame ; le transport qui l’agitait est apaisé comme vous voyez ; mais pourtant il n’est pas encore tout-à-fait hors de péril. Priez-le de rentrer, et ne le troublez plus jusqu’à ce qu’il soit tout-à-fait rétabli.
Shakspeare. Le Roi Lear.


Nous avons laissé l’empereur Alexis Comnène au fond d’un cachot souterrain, avec une lampe expirante et veillant un captif qui semblait également n’avoir plus que le souffle. Il écouta d’abord le bruit des pas de sa fille qui remontait ; puis il devint impatient, et commença à désirer son retour avant qu’elle eût pu parcourir l’espace qui se trouvait entre lui et le haut de ce sombre escalier. Une minute ou deux il endura avec patience l’absence du secours qu’il l’avait envoyée chercher ; mais d’étranges soupçons commencèrent à s’emparer de son esprit… Serait-ce possible ? aurait-elle changé de résolution à cause des dures paroles qu’il lui avait adressées ? aurait-elle résolu d’abandonner son père à son destin à l’heure du plus pressant besoin, et ne devait-il plus compter sur l’assistance qu’il l’avait suppliée de lui procurer ?

Le peu d’instans que la princesse perdit à minauder avec le Varangien Hereward, fut décuplé par l’impatience de l’empereur, qui commença à croire qu’elle était allée chercher les complices du césar pour l’attaquer pendant qu’il était sans défense, et mettre à exécution leur conspiration presque déconcertée.

Après un temps considérable, rempli par ce sentiment d’incertitude mortelle, il commença enfin à reprendre du calme, et à réfléchir combien il était peu probable que la princesse, qui avait été