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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/362

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dans le palais. Toutefois, à moins que Votre Majesté impériale n’ait de fortes raisons d’agir autrement, j’ose dire que mon opinion serait que vous manqueriez à la mémoire du plus grand de vos prédécesseurs, si vous ne donniez pas au malheureux criminel, votre parent de si près, l’occasion de plaider sa cause avant de passer devant l’autel de refuge, quoiqu’il soit aujourd’hui dépouillé des lettres d’or qui composaient l’inscription, et de la statue d’or qui représentait la royale victime. »

On entendit alors une musique lugubre, qui montait l’escalier dont il a été si souvent fait mention.

« S’il faut que j’entende le césar Nicéphore Brienne avant qu’il passe l’autel de refuge, il n’y a point de temps à perdre, dit l’empereur ; car ces sons funèbres annoncent qu’il approche déjà de la Salle du Jugement. »

Les princesses reprirent aussitôt, et avec les plus vives instances le supplièrent de ne pas souffrir qu’on exécutât la sentence portée contre le césar, et le conjurèrent, s’il voulait maintenir la paix dans l’intérieur de sa maison et mériter la reconnaissance éternelle de son épouse et de sa fille, d’écouter leurs prières en faveur d’un infortuné séduit, entraîné dans le crime, mais innocent au fond du cœur.

« Du moins je le verrai, répondit l’empereur ; et le saint vœu de Constantin sera, en cette occasion, strictement accompli. Mais rappelez-vous, femmes insensées, que la situation de Crispus et celle du césar actuel diffèrent autant que le crime et l’innocence, et que, par conséquent, leur destin peut être décidé avec justice d’après des principes et avec des résultats contraires. Mais je verrai le criminel en face ; et vous, patriarche, vous pouvez me suivre pour prêter votre assistance à un homme mourant. Quant à vous, femme et mère du coupable, vous ferez mieux, ce me semble, de vous retirer à l’église, et de prier Dieu pour l’âme du défunt, plutôt que de troubler ses derniers moments par d’inutiles lamentations. — Alexis, dit l’impératrice Irène, je vous supplie de nous croire : soyez convaincu que nous ne vous quitterons pas dans cette volonté opiniâtre de répandre du sang, de crainte que vous ne laissiez, pour l’histoire de votre règne, des matériaux plus dignes des temps du sauvage Néron que de ceux du grand Constantin. »

L’empereur, sans répondre, se dirigea vers la Salle du Jugement, où une lumière plus brillante que de coutume éclairait déjà l’escalier de l’Achéron ; on entendait sortir des cachots à intervalles inégaux, les paroles des psaumes de la pénitence, que l’église grecque