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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 24, 1838.djvu/88

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tir des portes, et venir à notre rencontre, des charrettes et des fourgons chargés de rafraîchissements, que la chaleur de la journée, la longueur de la marche, la poussière et le manque d’eau nous avaient rendus de la dernière nécessité. Les soldats doublèrent joyeusement le pas pour rencontrer plus tôt les provisions dont ils avaient un si grand besoin. Mais il y a loin entre la coupe et les lèvres ! Quelle fut notre mortification de voir une nuée d’Arabes sortir au grand galop de la plaine boisée, entre l’armée romaine et la ville, se jeter sur les fourgons en massacrant ceux qui les conduisaient, et pillant ce qu’ils contenaient ! C’était un corps ennemi commandé par Varanes, jouissant, parmi ces infidèles, d’une réputation militaire égale à celle de feu son frère Jezdegerd. Lorsque Varanes se fut aperçu que les Varangiens, dans leur résistance désespérée, réussiraient à défendre le passage, il se mit à la tête d’un corps considérable de cavalerie ; et, comme ces infidèles sont montés sur des chevaux qui n’ont point d’égaux pour la vitesse et pour la longueur de leur haleine, il avait fait un long détour, traversé la chaîne pierreuse de ces montagnes à un défilé plus au nord, et s’était placé en embuscade dans l’espoir d’assaillir à l’improviste l’empereur et son armée, au moment même où ils regarderaient leur retraite comme à l’abri de toute attaque. Cette surprise eût eu lieu certainement, et il est difficile de dire quelles en eussent été les conséquences, si l’apparition inattendue du convoi de vivres n’eût éveillé la rapacité des Arabes, malgré la prudence de leur commandant et les tentatives qu’il fit pour les contenir. Ainsi fut déjouée cette embuscade.

« Mais Varanes, voulant encore essayer de remporter quelque avantage par la rapidité de ses mouvements, assembla autant de cavaliers qu’il put en arracher au pillage, et poussa en avant du côté des Romains, qui s’étaient arrêtés court à cette apparition si inattendue. Il régnait dans nos premiers rangs une incertitude et une irrésolution qui rendaient leur hésitation évidente, même pour un aussi pauvre juge que moi en fait de contenance militaire. Au contraire, les Varangiens, d’une voix unanime, s’écrièrent : « Bills (c’est-à-dire les haches d’armes) en avant ! » Et la volonté très gracieuse de l’empereur accédant à leur valeureux désir, ils s’avancèrent rapidement de l’arrière-garde à la tête de la colonne. J’aurais peine à dire comment cette manœuvre fut exécutée, mais elle le fut, sans aucun doute, par les sages instructions de mon sérénissime père, distingué pour sa présence d’esprit dans les cir-