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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/200

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vécu. Eh bien, que Dieu nous fasse grâce ! il y a un ciel au-dessus de nos têtes (ici elle soupira profondément), et une belle lune encore, par-dessus le marché. » Ici elle fit un nouvel éclat de rire.

« Est-ce que nous resterons là toute la nuit ? dit Sharpitlaw avec beaucoup d’impatience ; « faites-la marcher en avant, Ratcliffe. — Oui-dà, monsieur, si nous savions de quel côté la faire marcher, nous ne serions plus dans l’embarras. Allons, Madge, mon cœur, dit-il, nous n’arriverons pas à temps pour voir Nicol et sa femme, si vous ne nous montrez la route. — C’est vrai, Raton, dit-elle, dépêchons-nous ; » et le saisissant par le bras, elle se remit à marcher à si grands pas que les autres pouvaient à peine la suivre. « Et je vous dirai, Raton, que Nicol Muschat sera bien content de vous voir, car il dit qu’il sait bien qu’il n’y a pas hors de l’enfer un aussi grand coquin que vous l’êtes, et il sera ravi de causer avec vous. Qui se ressemble s’assemble, comme vous savez. C’est un proverbe qui ne ment jamais, et vous êtes tous deux une paire de favoris du diable. Il est embarrassant de dire lequel mérite le coin le plus chaud dans sa fournaise. »

Ratcliffe, involontairement entraîné par sa conscience, ne put s’empêcher de protester contre cette association. « Je n’ai jamais répandu le sang, dit-il. — Mais vous l’avez vendu, Raton ; vous l’avez vendu plus d’une fois : on tue avec la langue aussi bien qu’avec le fer :

C’est le gentil garçon boucher,
Portant double manchette bleue,
Qui le samedi vient hacher
Le bœuf qu’il a tué la veille à la banlieue. »

« Et que fais-je en ce moment ? pensa Ratcliffe, mais je n’aurai pas sur mes mains le sang de Robertson, si je puis l’éviter. « Puis parlant bas à Madge, il lui demanda si elle ne se rappelait pas quelqu’une de ses vieilles chansons.

« Plus d’une belle, répondit Madge, que je puis chanter de tout mon cœur, car une chanson gaie ranime l’esprit, et elle chanta :

Quand le milan cruel fend l’azur des nuages,
L’alouette se cache au milieu des bocages ;
Quand les chiens battent les taillis,
Au sein des monts le daim va chercher des abris. »

« Arrêtez sa maudite langue, quand vous devriez la lui couper, dit Sharpitlaw ; j’aperçois quelqu’un là-bas : tenez-vous prêts, mes enfants, et tournez la hauteur à petits pas. George Poinder,