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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/227

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Davie Deans réfléchit un moment ; car appliquant aussi les paroles de Jeanie aux scrupules qu’il lui supposait, il lui semblait que, comme femme et comme sœur, ce n’était guère dans un cas semblable qu’elle pouvait les écouter, surtout après que lui, homme ferme et qui avait su conserver sa foi dans ces temps d’épreuve, lui avait donné à entendre qu’elle pouvait dans cette occasion s’abandonner aux mouvements que la nature devait lui inspirer. Cependant il ne se démentit pas dans la résolution qu’il avait prise, jusqu’au moment où ses yeux s’étant arrêtés involontairement sur le petit lit d’Effie, l’image de cette enfant de sa vieillesse, telle qu’il l’y avait vue assise, pâle, languissante et abattue, vint tout à coup s’offrir à son esprit ; et c’est le cœur rempli de ce souvenir qu’il commença involontairement, et d’un ton bien différent de la précision dogmatique avec laquelle il argumentait en général, un raisonnement en faveur de la ligne de conduite qui pouvait sauver la vie de son enfant.

« Ma fille, dit-il, je n’ai pas prétendu dire que votre route était sans écueils, et sans doute cette action peut être considérée par quelques gens comme une transgression de nos lois, puisque celui qui rend témoignage illégalement et contre sa conscience peut en quelque sorte être considéré comme portant un faux témoignage.

« Cependant, en matière de soumission, le mal existe moins dans la soumission elle-même que dans l’esprit et l’intention de celui qui se soumet. C’est pourquoi, bien que j’aie élevé la voix contre les apostasies publiques, je n’ai pas eu le courage de m’éloigner de ceux auxquels leur conscience a permis d’écouter les discours de ces ministres qui ont prêté le fatal serment ; car ils peuvent peut-être profiter de leurs paroles, quoiqu’elles soient stériles pour moi. »

Quand Davie en fut là sa conscience lui reprocha ce langage comme tendant peut-être à porter indirectement atteinte à la pureté de foi de sa fille et à l’encourager à s’écarter de la sévérité de ses principes. Il s’arrêta donc subitement, et, changeant de ton : « Jeanie, » ajouta-t-il après un moment de pause, « je m’aperçois que nos criminelles affections (je les appelle ainsi relativement à l’obéissance que nous devons à la volonté du Créateur) se font sentir avec trop de force dans cette heure de douleur et d’épreuve, pour me permettre d’envisager mon devoir d’un œil ferme ou de vous diriger dans le vôtre. Je ne parlerai donc plus