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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/306

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devant la porte de son palais, ainsi que nous le représente l’Écriture ; mais j’ai quelque chose en moi qui soutiendra mon courage, et je suis presque sûre que je trouverai la force nécessaire pour leur expliquer ma demande. — Hélas ! hélas ! les rois d’à présent ne s’asseyent pas sur leur porte pour rendre la justice, comme du temps des patriarches. Je connais aussi peu les usages de la cour que vous, Jeanie, mais j’ai appris par la lecture et par ce que j’ai entendu dire, que le roi de la Grande-Bretagne ne fait rien que par ses ministres. — Si ce sont des ministres justes et craignant Dieu, il n’y en a que plus d’espoir pour Effie et pour moi. — Mais vous ne comprenez pas même la signification des mots les plus ordinaires à la cour. Par le mot ministres on n’entend pas des ecclésiastiques, mais les serviteurs officiels du roi. — Je ne doute pas qu’il n’en ait un bien plus grand nombre que la duchesse n’en a elle-même à Dalkeith, et je sais que les serviteurs des grands sont toujours plus arrogants que leurs maîtres ; mais je m’habillerai décemment, et je leur offrirai une pièce d’argent, comme si je venais seulement pour voir le palais ; et s’ils me refusent, je leur dirai que je viens pour une affaire où il s’agit de vie et de mort, et alors ils me feront sûrement parler au roi et à la reine. »

Butler secoua la tête. « Jeanie, tout ceci n’est qu’un rêve. Vous ne parviendrez jamais à les voir qu’avec la protection de quelque grand seigneur, et même de cette manière la chose me paraît presque impossible. — Mais il est possible aussi que j’obtienne cette protection avec votre secours, Reuben. — Mon secours, Jeanie ? voilà bien l’idée la plus extravagante… — Non pas du tout, Reuben. Ne vous ai-je pas entendu dire que votre grand-père, dont mon père n’aime pas à entendre parler, rendit, il y a bien long-temps, quelque service à l’aïeul de Mac-Callum More quand il n’était encore que lord de Lorn ? — C’est vrai, et je puis le prouver. J’écrirai au duc d’Argile… La renommée proclame qu’il a autant d’humanité que de bravoure et d’attachement aux intérêts de sa patrie. Je le supplierai de détourner de votre sœur le sort cruel qui la menace… Nous n’avons qu’un faible espoir de succès, mais nous ne négligerons aucun moyen. — Nous ne négligerons aucun moyen ; mais ce n’est pas en écrivant qu’on peut réussir : une lettre ne peut prier, conjurer, et s’adresser au cœur humain aussi bien que la voix et les regards ; une lettre est comme la musique que les dames mettent devant leur épinette : ce ne