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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/352

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joues rouges de honte, était traînée en triomphe après elle, pour ainsi dire.

Mais heureusement Madge fut arrêtée subitement pendant qu’elle s’agitait ainsi, par un regard que le ministre jeta sur elle, et qui exprimait à la fois la compassion et la gravité. Elle se hâta d’entrer dans un banc qui se trouvait près d’elle, et y entraîna Jeanie. Alongeant un coup de pied à cette dernière, comme pour l’avertir sans doute de suivre son exemple, elle pencha sa tête sur ses mains pendant l’espace d’une minute. Jeanie, entièrement, étrangère à cette attitude de dévotion mentale, n’essaya pas de l’imiter, mais regarda autour d’elle d’un air égaré que ses voisins, la jugeant d’après la compagnie où elle était, attribuèrent assez naturellement à la folie. Tous ceux qui se trouvaient dans le voisinage de ce couple extraordinaire, s’en éloignèrent autant que le leur permirent les limites de leurs propres bancs ; mais un vieillard ne s’étant pas éloigné assez lestement de Madge, elle lui arracha son livre et y chercha les prières du jour. Elle se mit ensuite à tourner les feuillets avec les gestes les plus emphatiques et les plus ridicules, montra à Jeanie de quelle manière les passages devaient être lus pendant le service, répondant en même temps aux prières d’une voix qui se faisait entendre par-dessus toutes celles de la congrégation.

Malgré la honte et la contrariété que Jeanie éprouvait en se voyant ainsi exposée aux regards dans un lieu de dévotion, elle chercha toutefois à recueillir son courage et à chercher un protecteur auquel elle s’adresserait aussitôt que le service serait terminé. Sa première pensée se porta sur le ministre ; et elle fut d’autant plus confirmée dans cette résolution, que c’était un homme d’un certain âge, d’un extérieur imposant et respectable : il avait lu les prières avec un calme et une gravité qui avaient rappelé à l’ordre quelques jeunes membres de la congrégation, dont les extravagances de Madge avaient distrait l’attention. Ce fut donc le ministre que Jeanie résolut d’aborder quand le service serait terminé.

Il est vrai qu’elle était un peu choquée de son surplis dont elle avait entendu parler si souvent, mais qu’elle n’avait encore vu sur la personne d’aucun prédicateur. Elle ne comprenait rien non plus aux changements de posture observés dans différentes parties du service ; elle en était d’autant plus embarrassée, que Madge, à qui ces changements paraissaient parfaitement fami-