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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/560

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Le voyage que les deux beaux-frères firent de compagnie fut plus agréable pour sir George Staunton lui-même qu’il n’avait osé l’espérer. Il sentit son cœur s’alléger en dépit de lui quand ils eurent perdu de vue Édimbourg, et la conversation intéressante et sensée de Butler était bien faite pour distraire son esprit des pénibles réflexions qui l’occupaient. Il lui vint même la pensée qu’il ne serait peut-être pas très-difficile d’établir les parents de sa femme au rectorat de Willingham ; il ne s’agissait de son côté que de procurer quelque cure encore plus importante au titulaire actuel ; quant à Butler, il n’avait qu’à prendre les ordres conformément à l’Église anglicane, démarche à laquelle il ne pouvait supposer que celui-ci opposât la moindre objection. Sans doute il lui serait pénible de voir tous les jours mistress Butler qu’il savait instruite de toutes les circonstances de sa fatale histoire, mais aussi, quoiqu’il n’eût eu jusque là aucune raison de se plaindre de son indiscrétion, il se croirait encore plus sûr de son silence. D’ailleurs la présence de sa sœur serait pour sa femme une distraction qui dissiperait son ennui, et lui épargnerait à lui-même ces importunités souvent fâcheuses dont elle le tourmentait, sous prétexte du manque absolu de société à Willingham, pour prolonger son séjour à la ville lorsqu’il témoignait le désir de se retirer à la campagne. « Madame votre sœur y est, » serait, suivant lui, une réponse péremptoire à cet argument.

Il sonda Butler sur ce sujet, lui demandant ce qu’il penserait d’un bénéfice de 1200 liv. sterl. de revenu en Angleterre, à la charge d’accorder quelquefois sa compagnie à un voisin dont la santé n’était pas très-forte, ni l’humeur très-égale. Il pourrait y rencontrer de temps en temps, ajouta-t-il, un homme très-instruit et de beaucoup de mérite, qui était dans les ordres comme prêtre catholique ; mais il espérait que ce ne serait pas une objection insurmontable pour un homme qui avait une manière de penser aussi libérale que monsieur Butler. « Quelle serait, dit-il, la réponse de monsieur Butler, si une telle offre lui était faite ?

« Que je ne pourrais l’accepter, répondit Butler. Je n’ai nullement l’intention d’entrer ici dans une discussion sur les différences de nos Églises, mais j’ai été élevé et j’ai reçu l’ordination dans celle dont je suis ministre aujourd’hui ; je suis convaincu de la vérité de ses doctrines, et je mourrai sous les