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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/128

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militaire, son habitude de faire céder à l’énergie de sa volonté tous les obstacles, même lorsqu’ils paraissent insurmontables, tout a contribué à donner à son caractère une habitude de ténacité qui lui rend insupportable toute contradiction et le porte peu à l’indulgence. D’un autre côté, il possède tant de belles qualités ! Savez-vous qu’il court un bruit (il m’a été à moitié confirmé par quelques paroles mystérieuses échappées à ma pauvre mère) qu’il est versé dans des sciences perdues maintenant pour le monde, qui permettent à celui qui les possède de plonger jusque dans l’avenir ? L’idée d’un tel pouvoir, ou même un talent élevé et une intelligence supérieure que l’on peut prendre pour cette puissance, ne jette-t-elle pas, ma chère Mathilde, une grandeur mystérieuse sur celui qui la possède ? Vous appellerez cela du romanesque ; mais considérez que je suis née dans la terre des talismans et de la magie, et que mon enfance a été bercée par ces contes dont vous ne pouvez jouir qu’au moyen d’une traduction française qui leur enlève beaucoup de leur prix. Ô Mathilde, je voudrais que vous eussiez pu voir les visages basanés de mes femmes indiennes rangées en cercle, et prêtant une oreille attentive à celle qui dans une langue si poétique racontait ces ravissantes histoires ! Il n’est pas étonnant que les fictions européennes paraissent froides et insipides quand on a vu les effets merveilleux que les narrations des Orientaux produisent sur ceux qui les écoutent. »


deuxième extrait.


« Vous êtes dépositaire, ma chère Mathide, du secret de mon cœur ; vous connaissez les sentiments que j’ai pour Brown : je ne dirai point pour son souvenir, car je suis convaincue qu’il vit et qu’il est fidèle. Son amour pour moi était autorisé par ma mère. Peut-être fut-ce une imprudence, à cause des préjugés de mon père sur le rang et la naissance. Mais on ne pouvait certainement pas exiger de moi, qui alors étais presque une enfant, que je fusse plus sage que celle sous la garde de qui la nature m’avait placée. Mon père était constamment occupé de ses devoirs militaires ; je ne le voyais qu’à des intervalles éloignés, et l’on m’avait appris à avoir pour lui plus de respect que de confiance. Plût au ciel qu’il en eût été autrement ! Lui et moi serions peut-être plus heureux ! »


troisième extrait.


« Vous me demandez pourquoi je ne fais pas savoir à mon père