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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/273

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tention des assistants et les amener à s’unir d’esprit et de cœur aux prières de l’Église ; mais, dans le rituel écossais, rien ne peut produire un tel effet, et si les assistants ne sont pas véritablement pénétrés, l’ennui, une hypocrisie mal déguisée, sont tout ce que l’on peut lire sur leurs visages. Malheureusement, mistress Marguerite Bertram était une de ces personnes qui ne savent point, par la bonté de leur caractère, se concilier l’affection générale ; elle n’avait pas de proches parents à qui la force du sang eût pu seule arracher des larmes : aussi ne voyait-on parmi ceux qui assistaient à ses funérailles que les formes extérieures de l’affliction.

Mannering, au milieu de cette lugubre réunion de cousins aux troisième, quatrième, cinquième et sixième degrés, composait son visage à l’instar des visages graves et solennels qu’il voyait autour de lui ; il paraissait aussi triste de la mort de mistress Marguerite Bertram que si la défunte dame de Singleside avait été sa sœur ou sa mère. Après un moment de silence profond et imposant, des conversations s’établirent dans l’assemblée.

« Notre pauvre amie, » dit un grave monsieur, ouvrant à peine la bouche de crainte de déranger le sérieux mélancolique qu’il avait cherché à donner à ses traits, et laissant couler ses paroles d’entre ses lèvres, qu’il tenait aussi serrées que possible ; « notre pauvre amie a au moins vécu dans l’affluence des biens de ce monde. — Sans doute, » répondit celui auquel s’adressait cette réflexion, les yeux à moitié fermés, « la pauvre mistress Marguerite était bien ménagère de ce qu’elle possédait. »

« Y a-t-il des nouvelles aujourd’hui, colonel Mannering ? » dit à ce dernier un des messieurs qui avaient dîné avec lui la veille, mais d’une voix aussi grave et aussi sombre que s’il avait annoncé la mort de toute sa famille.

« Rien de particulier, je crois, monsieur, » répliqua Mannering d’un ton qu’il mettait autant que possible en harmonie avec celui qui régnait dans cette funèbre réunion.

« Il paraît, » continua celui qui avait parlé le premier, d’un air important et comme un homme bien informé, « il paraît qu’il y a un testament. — Et qu’aura la petite Jenny Gibson ? — Cent livres et la vieille montre à répétition. — C’est bien peu de chose. La pauvre enfant ! elle a été bien long-temps avec la vieille dame ; mais on a toujours tort de compter sur les souliers des morts. »

« Je crains bien, » dit le politique placé à côté de Mannering, « que nous n’en ayons pas fini avec votre vieil ami Tippo-Saïb. Je