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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 6, 1838.djvu/358

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Bertram commença à concevoir de sérieuses inquiétudes pour lui et pour son compagnon. Le plus profond silence régnait dans la prison ; on eût dit que le geôlier avait déserté son poste et abandonné la prison et ses malheureux habitants aux flammes qui les menaçaient. Bientôt on entendit frapper avec une violence extrême contre la porte extérieure de la prison, qui céda enfin aux efforts des pioches et des leviers. Mac-Guffog, aussi lâche qu’insolent, avait pris la fuite avec sa femme plus méchante encore. Leurs valets abandonnèrent facilement les clefs ; les prisonniers, ainsi délivrés, accueillirent avec de féroces acclamations de joie la canaille qui leur avait rendu la liberté et se joignirent à elle.

Au milieu de la confusion qui suivit, trois ou quatre des principaux contrebandiers entrèrent dans la chambre de Bertram, armés de sabres et de pistolets ; ils portaient des torches ardentes. « Par le diable, dit le chef, c’est bien lui ! » et deux hommes saisirent Bertram ; mais l’un d’eux lui dit bas à l’oreille : « Ne faites pas de résistance avant d’être dans la rue. » Le même individu trouva l’occasion de dire à Dinmont : « Suivez votre ami, et donnez-lui un coup de main quand il en sera temps. »

Dinmont obéit et les suivit. Les deux contrebandiers entraînèrent Bertram, lui firent descendre l’escalier, traverser la cour alors éclairée par l’incendie, puis la rue étroite sur laquelle s’ouvrait la prison. Là régnait la plus grande confusion, et les contrebandiers se trouvaient forcément séparés les uns des autres. Le bruit d’une troupe de cavalerie qui arrivait au galop leur donna l’alarme. « Par le diable et l’enfer, qu’y a-t-il ? s’écria le chef ; serrez vos rangs, mes amis, veillez sur le prisonnier… » Malgré cet ordre, les deux hommes qui tenaient Bertram restaient en arrière.

Le bruit des armes se fit entendre devant eux. La foule devenait de plus en plus agitée, les uns cherchant à se défendre, les autres à s’enfuir. On tirait des coups de fusil ; bientôt même on vit briller au-dessus des têtes les larges et longs sabres des dragons. « À présent, » dit à voix basse l’homme qui tenait le bras gauche de Bertram, le même qui lui avait déjà parlé ; « débarrassez-vous de ce drôle-là, et suivez-moi. »

Bertram, déployant tout-à-coup et avec succès sa vigueur, échappa facilement aux mains de celui qui le tenait à droite. Le bandit voulut tirer son pistolet, mais il fut terrassé par un coup de poing de Dinmont, assez vigoureux pour renverser même un bœuf. « Suivez-moi vite, » lui dit son zélé protecteur, et il prit une petite rue sale non loin de la prison.