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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 8, 1838.djvu/116

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« Un vieux manoir, répondit Wildrake, et, autant que j’en puis juger par une seule nuit que j’y ai passée, abondamment pourvu d’escaliers dérobés, de passages souterrains, et de toutes ces communications secrètes qui existent dans ces vieux nids de corbeaux.

— Cachette à receler des prêtres, sans doute ; il est rare que les vieux châteaux n’aient pas de secrètes étables pour héberger les veaux de Béthel. — Votre Honneur peut en jurer. — Je ne jure jamais, » répliqua le général sèchement. « Mais qu’en penses-tu, bon drôle ?… je vais te faire une terrible question… où est-il plus vraisemblable que les deux fugitifs de Worcester que tu connais aient trouvé un refuge… et il faut qu’ils aillent ailleurs assurément… que dans ce même vieux château, dont le jeune Albert connaît tous les coins et recoins depuis sa plus tendre enfance ? — Vraiment ! » dit Wildrake faisant un effort pour répondre à cette question d’un air d’indifférence, tandis que la possibilité de cet événement et ses conséquences se présentaient à son esprit sous un jour effrayant ; « vraiment, je partagerais l’opinion de Votre Honneur, si je pouvais croire que la compagnie qui, au nom des commissaires du parlement, a pris possession de Woodstock, ne dût pas les en écarter comme un chat met en fuite les pigeons du colombier. Le voisinage des généraux Desborough et Harrison, Dieu les protège ! ne conviendrait guère à des fugitifs de Worcester. — Je suis de ton avis, et je voudrais qu’il n’en fût pas autrement : puisse-t-il se passer bien du temps avant que nos noms cessent de répandre la terreur parmi nos ennemis ! Mais, dans cette affaire, si tu veux servir rondement les intérêts de ton maître, tu peux, je crois, seconder favorablement ses projets. — Ma cervelle est trop faible pour comprendre la profondeur de votre honorable dessein, dit Wildrake. — Écoute-moi donc, et fais-en ton profit. Assurément la victoire de Worcester fut un des grands bienfaits du ciel ; mais il me semble que nous paraîtrions bien peu reconnaissants envers Dieu, si nous ne faisions pas tout ce qui est en notre pouvoir pour hâter l’achèvement et la conclusion du grand ouvrage qui a tant prospéré entre nos mains, déclarant en toute humilité et sincérité de cœur que nous n’avons jamais désiré qu’on se ressouvînt de ceux qui en furent les instruments ; bien plus, nous prierions et supplierions d’ensevelir dans l’oubli nos noms, plutôt que de voir le grand ouvrage rester incomplet. Toutefois, en vérité, placés comme nous le sommes, il nous importe plus qu’à d’autres… c’est-à-dire que si de pauvres gens se disent plus ou moins intéres-