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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 8, 1838.djvu/30

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teaux pour les fainéants porteurs de soutane d’Oxford, ces prêtres orgueilleux dont les yeux étaient tellement enfoncés dans la graisse qu’ils ne purent voir la destruction avant qu’elle les eût saisis à la gorge. Mais je puis vous dire où il a été forgé, trempé, affilé, émoulu et poli. Pendant que vous étiez, comme je viens de le dire, occupés à fabriquer des couteaux pour des prêtres menteurs, et des dagues pour des cavaliers, fieffés libertins, qui devaient s’en servir pour assassiner le peuple d’Angleterre… il fut forgé à Long-Marston-Moor[1], où les coups tombèrent… plus rapidement que le marteau sur l’enclume… Il fut trempé à Naseby[2] dans le plus pur sang des cavaliers… Il fut soudé en Irlande contre les murs de Drogheda… et émoussé sur les poitrines écossaises à Dunbar… Et tout récemment il fut poli à Worcester, jusqu’à ce qu’il devînt brillant comme le soleil au milieu du ciel, et il n’est pas de lumière en Angleterre qui pusse lui être comparée. »

Ici les militaires qui faisaient partie de la congrégation firent entendre un bourdonnement approbateur qui, analogue aux « Écoutez ! écoutez ! » de la chambre des communes en Angleterre, ne pouvait manquer d’exciter encore l’enthousiasme de l’orateur, en lui révélant qu’il avait éveillé la sympathie de son auditoire. « Ainsi donc, » continua le prédicateur redoublant d’énergie en voyant que l’auditoire partageait ses sentiments, « que dit le texte ?… Élève-toi dans la prospérité… Ne t’arrête pas… Ne fais pas halte… Ne quitte pas la selle… Poursuis les fuyards épars… Sonne de la trompette… Que ce soit non un chant joyeux, non une fanfare, mais une marche guerrière… Sonne de la trompette ; allons, à cheval, cavaliers, et en avant !… Qu’on charge l’ennemi… Poursuis le jeune homme[3]… Qui vous intéressera pour lui ? Frappe, pille, ravage, partage les dépouilles… La bénédiction est sur toi, Olivier, à cause de ton honneur… Ta cause est on ne peut plus légitime, et ta vocation incontestable… La défaite n’approcha jamais de ton bâton de commandement, et le mauvais destin ne suivit jamais ta bannière… Levez-vous, fleur des soldats de l’Angleterre… Lève-toi, général choisi des champions de Dieu. Ceins

  1. Plaine du comté d’York, où la cause de Charles Ier essuya un si rude échec en 1644. a. m.
  2. Village du comté de Northampton, près duquel fut livrée, en 1615, une sanglante bataille où Cromwell et Charles Ier combattirent en personne. a. m.
  3. C’est ainsi que les républicains désignaient quelquefois Charles II, qui se réfugia en France, après le désastre de Worcester, en 1651. a. m.