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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 8, 1838.djvu/384

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Wildrake l’occasion de se rafraîchir, tandis qu’il jugeait qu’une seule suffisait au colonel et à son révérend hôte.

Pendant qu’ils étaient ainsi occupés, le bon théologien se perdant dans ses propres raisonnements, et les auditeurs dans leurs pensées particulières, leur attention fut, vers dix heures, attirée par un coup frappé à la porte de la rue. Pour ceux qui ont le cœur inquiet, des bagatelles sont des sujets d’alarme.

Un coup frappé à une porte peut même avoir un caractère qui excite l’appréhension. Celui qu’on venait d’entendre n’était ni un bruit faible et tranquille, annonçant une modeste visite, ni un tapage bruyant et pompeux indiquant l’arrivée d’un grand personnage. On ne pouvait pas penser non plus que ce fût un étranger venant pour affaire d’urgence, ni un ami joyeux qui est toujours le bienvenu ; c’était un seul coup, un son solennel et sombre, sinon tout-à-fait menaçant. La porte fut ouverte par un des gens de la maison ; un pas pesant retentit sur l’escalier… Un homme vigoureux entra dans l’appartement, et laissa tomber le manteau qui lui couvrait le visage en disant : « Markham Éverard, salut à toi, au nom de Dieu ! »

C’était le général Cromwell.

Éverard, déconcerté et surpris à l’improviste, s’efforça vainement de trouver des termes pour exprimer son étonnement, et s’empressa de recevoir le général, de l’aider à quitter son manteau et de lui faire, mais sans dire mot, les civilités ordinaires d’une réception. Le général promena son œil perçant autour de la chambre, et fixant d’abord le théologien, adressa la parole à Éverard.

« Je vois un révérend homme avec toi, tu n’es pas un de ceux, cher Markham, qui laissent passer le temps sans y songer, sans en profiter. Mettre de côté les choses de ce monde, s’attacher exclusivement à celles de l’autre, c’est en employant ainsi nos jours dans cette pauvre demeure de péchés et de soucis terrestres, que nous pouvons pour ainsi dire parler… Mais, qu’est-ce à dire ? » continua-t-il en changeant tout-à-coup de ton, et en prenant une voix brusque, aigre et inquiète : « quelqu’un est sorti de l’appartement depuis que j’y suis entré ? »

En effet, Wildrake s’était absenté une minute ou deux ; mais il était déjà revenu, et sortit de l’embrasure d’une fenêtre, comme s’il s’était seulement tenu à l’écart, non pas hors de la chambre. « Non, monsieur, dit-il, je me suis seulement un peu éloigné par respect. Noble général, j’espère que tout va bien dans l’État pour que Votre Excel-