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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 9, 1838.djvu/203

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dans ses bonnes grâces, si j’avais employé pour cela les artifices dont se servait Rashleigh, qui, profitant de l’éloignement de son père pour les affaires, s’était peu à peu insinué dans l’administration de ses biens. Mais quoique je prêtasse avec empressement à mon oncle les secours de ma plume et de mon arithmétique toutes les fois qu’il en avait besoin pour correspondre avec ses voisins ou régler un compte avec un fermier, et que je fusse ainsi un hôte plus utile dans sa famille qu’aucun de ses fils, cependant je ne voulais pas me charger entièrement du soin de ses affaires ; de sorte que le bon chevalier, tout en reconnaissant que son neveu Frank était un garçon sûr et habile, ajoutait presque toujours qu’il n’aurait pas cru que Rashleigh lui fût aussi nécessaire.

Comme il est désagréable de vivre dans une famille et d’être mal avec tous ses membres, je fis quelques efforts pour gagner la bienveillance de mes cousins ; je changeai mon chapeau galonné contre une casquette de jockey, et je fis quelques progrès dans leur estime ; je domptai un jeune cheval d’une manière qui m’avança encore plus dans leurs bonnes grâces. Un pari ou deux perdus à propos avec Dickon, et une santé dont je fis largement raison à Percy, me mirent sur un pied d’entière familiarité avec les jeunes squires, excepté avec Thorncliff.

J’ai déjà parlé de l’éloignement qu’avait pour moi ce jeune homme qui, doué d’un peu plus de bon sens qu’aucun de ses frères, avait aussi un plus mauvais caractère. Bourru et querelleur, il était mécontent de mon séjour à Osbaldistone-Hall, et voyait d’un œil jaloux mon intimité avec Diana Vernon, que certain pacte de famille lui promettait pour épouse. On ne saurait dire qu’il l’aimait, au moins sans profaner ce mot ; mais il la regardait comme lui appartenant en quelque sorte, et se sentait piqué d’une usurpation qu’il ne savait comment prévenir ou faire cesser. J’essayai plusieurs fois de me réconcilier avec lui, mais il repoussa toujours mes avances, à peu près avec autant de grâce qu’un mâtin qui s’apprête à mordre la main étrangère qui vient le caresser. Je le laissai donc à sa mauvaise humeur, et ne m’en occupai pas davantage.

Telle était ma position à l’égard de la famille d’Osbaldistone-Hall. Mais je dois parler d’un autre habitant du château avec lequel je m’entretenais quelquefois ; c’était André Fairservice, le jardinier, qui, depuis qu’il avait découvert que j’étais protestant, me laissait rarement passer sans m’ouvrir sa tabatière. Cette