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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 9, 1838.djvu/470

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avait fait place à une sorte de soumission mélancolique, de résignation mêlée de fermeté. Son père, quoiqu’il connût et redoutât l’effet que les louanges qu’il donnerait à sa fille devaient produire sur moi, ne put résister au plaisir de faire son éloge.

« Elle a supporté, me dit-il, des épreuves dignes de trouver place dans l’histoire d’un martyr… Elle a regardé en face les dangers et la mort sous mille formes différentes… Elle a enduré des fatigues et des privations qui auraient abattu les hommes les plus robustes… Elle a passé les jours dans les ténèbres, les nuits dans les veilles, sans qu’il lui soit jamais échappé un murmure, une plainte, le plus léger signe de faiblesse. En un mot, monsieur Osbaldistone, c’est une offrande digne de Dieu auquel (ajouta-t-il en se signant) je vais la consacrer, comme ce qui reste de plus cher et de plus précieux à Frédéric Vernon. »

Il cessa de parler ; je ne l’avais que trop bien compris ; son but était maintenant, comme lorsque je le rencontrai en Écosse, de détruire tout espoir que j’aurais pu conserver d’une union avec sa fille.

« Maintenant que monsieur Osbaldistone connaît la triste situation des infortunés qui viennent de réclamer sa protection, dit-il à Diana, nous n’abuserons pas plus long-temps de ses moments. »

Je les priai de rester, et leur offris de quitter moi-même la bibliothèque. Sir Frédéric me répondit que ce serait éveiller les soupçons de mon domestique ; que le lieu de leur retraite était plus sûr sous tous les rapports, et que Syddall l’avait pourvu de tout ce qui leur était nécessaire. « Nous aurions pu vraisemblablement y rester cachés sans que vous l’eussiez découvert, ajouta-t-il ; mais la délicatesse me faisait un devoir de confier ma sûreté à Votre Honneur.

— Vous n’avez fait que me rendre justice… Je suis peu connu de vous, sir Frédéric ; mais miss Vernon, j’en suis certain, vous dira…

— Je n’ai pas besoin du témoignage de ma fille, » dit-il d’un air poli, mais de manière à m’empêcher de m’adresser directement à elle ; « je suis disposé à attribuer les sentiments les plus honorables à monsieur Francis Osbaldistone. Mais permettez-nous de nous retirer… Il faut que nous profitions des moments de repos qui nous sont accordés, puisque nous ne savons pas si d’un moment à l’autre nous ne serons pas appelés à continuer notre dangereux voyage. »