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Page:Œuvres mêlées 1865 III.djvu/154

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Civita-Vecchia, où il étoit prisonnier depuis six semaines, et où il seroit, à ce qu’il mandoit, bien plus de temps, si je n’avois pas la générosité de m’employer encore pour lui. Quelque sujet que j’eusse de ne plus me mêler de cet homme, néanmoins, pour ne pas laisser mon ouvrage imparfait, je demandai sa liberté à Fra Vincenzo Rospigliosi, neveu du Pape, qui me l’accorda.

Cependant, le temps que je devois être dans le couvent étant passé, le cardinal Mancini répondit aux instances que ma sœur faisoit, à mon insu, pour m’en tirer : qu’il me conseilloit d’attendre un peu, parce qu’il seroit avantageux pour moi que la réponse qui venait de France m’y trouvât encore. Cette réponse fut : qu’après que j’y aurois demeuré deux ans, M. Mazarin verroit ce qu’il auroit à faire. Le cardinal Mancini vouloit que je me soumisse à cette condition ; et pour moi, dans l’accablement où j’étois de voir la dureté de M. Mazarin, j’étois capable de me résoudre à tout ; mais ma sœur voulut absolument que je sortisse. Elle fit négocier, pour cet effet, avec la reine de Suède, qui donna parole de me recevoir chez elle ; et il ne fut plus question que de me faire échapper. Ma sœur me vint voir une après-dîner. Comme nous étions ensemble dans ma chambre, que je disposois les choses pour m’en aller avec elle, et que Nanon étoit déjà toute ronde du grand nombre de bardes qu’elle avoit fourrées de tous côtés sous ses habits, nous fûmes averties que le conseil de la Reine l’avoit obligée de retirer la parole qu’elle avoit donnée en ma faveur. Quelque désagréable que fût cette nouvelle, il fut résolu de passer outre. Ma sœur se mit en devoir de s’en aller,