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Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/360

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quant à leur intention particulière, qui n’est plus, certainement, celle de Mlle de Scudéry. Les Portraits du Luxembourg sont comme’un goût de photographie du dix-septième siècle ; chacun fait la sienne, de sa main, avec une impartialité affectée, ou emploie la main de son ami, pour avoir la peinture complaisante de sa figure embellie. C’est un jeu de société, un divertissement d’esprit, dont l’objet est surtout d’amuser le salon.

Par conséquent, on ne sauroit, à mon avis, admettre que ce caprice a ouvert la route à la Bruyère. Trente années séparent la Bruyère de l’époque des Divers portraits ; et le but, pas plus que la forme du livre de notre grand moraliste, n’ont rien de commun avec ces exercices récréatifs du salon du Luxembourg. L’influence littéraire de la société de Mademoiselle se manifeste plutôt par d’autres ouvrages que par les Divers portraits. Le goût des Contes de Fée ne s’étoit pas produit encore10. Mais, dès 1656, Segrais avoit été le rédacteur des Nouvelles françoyses ou les divertissements de la princesse Aurélie, laquelle n’est autre que Mademoiselle ; cette princesse publioit elle-même, directement, en 1659, la Relation de l’isle imaginaire et l’histoire de la princesse de Paphlagonie. L’année d’après, Mme de la Fayette imprimoit le premier et l’un des plus intéressants de ses romans, la Princesse de Montpensier11. Dès lors, l’impulsion étoit donnée ; Mme de la Fayette n’a fait que s’y conformer dans Zaïde, dans la Princesse de Clèves, et


10. Voy. ma Lettre critique sur les Contes de Perrault.

11. Voy. la belle étude de M. Sainte-Beuve sur Mme de la Fayette.