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Page:Œuvres politiques de Machiavel.djvu/350

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le pays qu’ils ne peuvent y trouver leur subsistance, ni aller ailleurs, parce que les autres lieux sont également remplis d’habitants ; lorsque la mauvaise foi et la méchanceté des hommes sont montées à leur dernier degré, il faut nécessairement que le monde soit purgé par un de ces trois fléaux, afin que les hommes frappés par l’adversité, et réduits à un petit nombre, trouvent enfin une existence plus facile et redeviennent meilleurs.

Ainsi la Toscane, comme je l’ai dit ci-dessus, était déjà puissante, pleine de religion et de vertu ; elle possédait une langue et des coutumes nationales ; et tout fut englouti par la domination romaine : il ne resta d’elle que la seule mémoire de son nom.



CHAPITRE VI.


Comment les Romains se comportaient dans la conduite de la guerre.


J’ai déjà fait voir quelle conduite suivaient les Romains pour s’agrandir ; je vais dire maintenant de quelle manière ils s’y prenaient pour faire la guerre ; et chacune de leurs actions prouvera avec quelle sagesse ils surent, pour aplanir les chemins qui devaient les conduire à la grandeur suprême, s’écarter de la marche suivie universellement par les autres nations.

Le but de celui qui fait la guerre par choix ou par ambition est d’acquérir et de conserver ses conquêtes, et de se conduire de manière à ce qu’elles l’enrichissent, en n’épuisant ni le pays conquis, ni sa propre patrie. Il est donc indispensable, et durant la conquête et durant la possession, de ne point dépenser inutilement, mais de tout faire tourner au profit du bien commun. Quiconque veut parvenir à ce but doit imiter la conduite du peuple