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Page:Abbé du Prat - Vénus dans le cloître ou la Religieuse en chemise, 1920.djvu/185

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ayant révoltées toutes deux contre les anges de Satan qui nous ont voulu séduire, nous ont heureusement préservées de la contagion ; que nous sommes détrompées de toutes les fadaises du couvent ; que nous avons des amants d’un mérite distingué qui, dans notre brillante jeunesse, nous trouvent fort à leur gré et nous aiment jusqu’à l’adoration ; que, comme nous n’avons point fait de vœux. Ils prétendent empêcher efficacement que nous n’en fassions et se promettent par là de nous épouser ; qu’entre eux et nous il s’est tenu un grand conseil d’enlèvement volontaire de nos personnes, le mieux concerté qu’il se puisse, et qu’à l’aide d’un impénétrable secret toutes choses sont prêtes pour l’exécution ; que, par le moyen des bons livres huguenots qu’ils nous ont communiqués avec le Nouveau Testament de Mons, nous nous sommes doublement détrompées des folies de la clôture et des erreurs du papisme ; que, suivant les justes mesures qu’ils ont prises, les deux affreuses portes de notre prison et toutes les charmantes avenues de la Hollande nous sont ouvertes, et que nous sommes, si nous le voulons, à la veille de notre délivrance. Tu ne manqueras pas de m’objecter que l’entreprise est bien scabreuse ; que la mèche peut être découverte ; qu’on ne doit jamais s’embarquer sans biscuit ; que nous nous faisons ici pitié à nous-mêmes et que dans la suite nous aurons la honte et le malheur de ne faire qu’une pitié aussi stérile à des inconnus en