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Page:Abbé du Prat - Vénus dans le cloître ou la Religieuse en chemise, 1920.djvu/59

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par la portière qu’il allât au grand parloir, et qu’il ne s’impatientât pas. Je le fis bien attendre un bon quart d’heure, parce que je changeai de voile et de guimpe, afin de paraître devant lui un peu proprement, et de tâcher à répondre à l’espérance qu’il avait de voir une personne dont on lui avait fait le portrait si avantageusement. À son abord, je fis semblant de paraître un peu interdite, répondant fort sérieusement aux civilités qu’il me faisait ; mais cela ne le démonta point ; au contraire, il prit de là occasion de me dire fort hardiment qu’il savait qu’il était permis aux belles de parler d’un air indifférent, qu’il serait malséant à d’autres, mais qu’il avait lieu d’espérer que, se présentant à la faveur de ma meilleure amie, sa visite ne pourrait m’être qu’agréable.

Angélique. — Il passe pour avoir de l’esprit, et on peut dire que ses grands voyages, accompagnés de beaucoup d’expérience, ont ajouté à ses avantages naturels toute la perfection qui lui manquait.

Agnès. — Je ne sais point ce que tu lui as dit de moi, mais je trouve qu’il s’avançait beaucoup pour une première visite. Il tourna la conversation sur l’austérité des maisons religieuses, et tâcha de me persuader, par une infinité de raisons, de ne point suivre le zèle indiscret de la plupart, traitant de ridicules toutes celles qui mettaient sottement en usage toutes sortes de mortifications. Il me fit rire par le récit naïf de ce qui lui était arrivé en