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Page:About - Causeries, deuxième série.djvu/298

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du tirage assurément ; ce n’est pas l’œuvre d’un jour, mais ce sera l’œuvre d’un siècle, et d’un grand siècle. »

J’évoquai à l’appui de mon dire le tableau vraiment admirable des efforts qui se font en haut lieu pour aplanir les montées : le pouvoir, le capital, l’intelligence, incarnée dans la presse, tout le monde s’y met. Et le spectacle plus admirable encore de ces déshérités d’hier qui s’acheminent par millions vers une condition meilleure, s’aidant les uns les autres, centuplant leurs forces par l’association, travaillant le jour pour vivre et le soir pour s’instruire, dévorant les journaux, engloutissant les livres, remplissant les écoles d’adultes, envahissant les cours publics et les conférences, assiégeant les musées, les expositions, les amphithéâtres de l’école Galin-Paris-Chevé, enfin doublant l’étape dans les chemins les plus ardus, tant cette légion de traînards malgré eux est pressée de rejoindre l’avant-garde !

L’étranger sourit de mon patriotisme et répondit : « Mais si ce beau vernis de civilisation n’était qu’une pellicule brillante étendue sur beaucoup d’ignorance et de violence ? »

Je bondis. « Attendez, dit-il ; il sera toujours temps de me prouver que j’ai tort. Êtes-vous bien certain que les nouveaux appelés au banquet de l’intelligence sachent tirer profit de leurs lectures ?