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Page:About - Causeries, deuxième série.djvu/59

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moi sur toutes les questions, tant qu’elle n’avait pas été ma femme. Le lendemain du sacrement, elle a dressé la tête, roide comme aspic. Elle a démasqué toute une batterie de sottises vieilles et neuves, prêtes à mitrailler mon pauvre bon sens. Elle avait une foi à elle, des principes à elle, un confesseur à elle, une littérature, une médecine à elle, et tout un bataillon d’amies à elle, qui n’ont jamais été les miennes, grâce à Dieu ! J’ai des goûts simples, elle en avait d’autres. Mon père m’a laissé un nom auquel je tiens, et un titre dont je ne fais aucun cas : on est de son époque. Ma femme était de son époque, à elle ; le bonheur d’être marquise lui faisait sauter la cervelle au plafond. Elle m’a rétabli, bon gré, mal gré, dans ce coquin de marquisat, que je donnais au diable ; elle a tiré mes armes de la poussière pour les étaler partout : sur les panneaux de ma voiture, sur mon argenterie, mon linge, mes tapis, mes meubles ; pour un rien, elle me les aurait plaquées dans le dos ! Elle était née Dupont en ligne mâle et Mathieu en ligne féminine : épousez donc une bourgeoise par amour de la simplicité !

« Après deux ans de l’union la plus désunie qui ait jamais enchaîné un homme de bien, je n’étais plus ni maître ni valet dans ma maison. Ma femme avait tout usurpé, avec une demi-douzaine de petites amies. On faisait des parties de