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Page:About - Causeries, première série.djvu/23

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CAUSERIES.

robuste maître. Une petite déception sans conséquence, un insuccès partiel et tout à fait local, l’avait éloigné de Paris pour quelque temps. Il s’était retiré depuis quelque temps à Rome, dans la ville du repos solennel ; il y cherchait, il commençait à y trouver la paix de l’âme, loin du caprice orageux des cours. Il y était entouré d’une admiration et, ce qui vaut mieux, d’une estime universelle. Otium cum dignitate ! Que pouvait-il désirer de plus ? Et voilà qu’il obtient, sans l’avoir appelé, dans toute la force de son talent, dans toute la plénitude de ses espérances, le repos définitif et l’auguste dignité de la mort.

Il a laissé des travaux remarquables dans nos églises. Cette âme tendre, élevée, un peu mystique, véritable vase d’élection, conservait précieusement le sentiment chrétien, que tant d’autres ont perdu. C’est peut-être pourquoi je préfère ses portraits à ses peintures murales. Il y en a sept ou huit, qui resteront comme des chefs-d’œuvre. Le plus parfait de tous (j’ai le droit d’en parler, car il m’a coûté cher) est celui du prince Napoléon.

Flandrin avait commencé des décorations importantes ; qui les achèvera ? On parle d’Henri Lehmann, esprit ouvert et compréhensif au dernier point, talent facile, souple, varié, multiple. Il a quelques défauts, je l’avoue, mais cet élève indépendant de M. Ingres est par le nombre et l’éclat de ses qualités le plus digne héritier du disciple aimé.