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Page:About - La Grèce contemporaine.djvu/127

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monde. Ce n’est pas au quarantième jour du voyage que les idées de galop leur viennent en tête ; mais, au moment du départ, le grand air, la vue des champs, l’influence du printemps, tout les enivre, et il n’est pas toujours prudent de leur laisser la bride sur le cou. Pour peu que vous soyez trois ou quatre compagnons de voyage et que vos chevaux s’avisent de lutter de vitesse, vous êtes engagés dans un steeple-chase assez périlleux.

Le second jour de mon voyage en Morée, nous cheminions paisiblement vers l’isthme de Corinthe et le village de Calamaki. Nous venions de traverser les roches Scironiennes, et je pensais, pour ma part, que, si mon cheval était aussi fatigué que moi, il se coucherait de bonne heure. Au passage d’un petit ruisseau, Curzon descendit pour boire, et continua la route à pied. Son cheval, livré à lui-même, prit les devants. J’étais en tête de la caravane, je le vis passer devant moi sans y prendre garde. Mais un vieil agoyate se mit dans l’esprit de le rejoindre. Le cheval prit le trot. L’agoyate trotta de son côté : le cheval prit le galop ; je riais de voir comme les animaux à quatre pieds sont mieux organisés pour la course que les simples bipèdes. Mais mon cheval, en voyant courir son camarade, faisait aussi ses réflexions. Il se disait en lui-même : « Voilà un animal bien vaniteux ; parce qu’il n’a pas de cavalier sur le dos, il s’imagine qu’il va nous laisser en arrière. Nous verrons bien ! »

Et de partir au galop.

Je serrai la bride, je serrai les genoux, je serrai tout ce que je pus ; je rassemblai tous mes souvenirs