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Page:Académie française - Recueil des discours, 1890-1899, 2e partie, 1900.djvu/443

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les pièces qui ne gardent point par endroits la marque du temps où elles ont été écrites ? D’ailleurs, les sentiments exprimés ont-ils réellement vieilli ou bien plutôt n’est-ce pas nous qui sommes trop vieux pour les comprendre ? La Dame aux camélias n’en a pas moins déterminé dans la littérature dramatique un changement de direction comparable à celui que Madame Bovary de Flaubert a opéré dans le roman contemporain. Il est possible que dans la voie ouverte par Dumas fils ses successeurs aient été plus loin — trop loin même au goût de quelques esprits… ; il est certain néanmoins que le chemin a été frayé, élargi, illuminé par lui, et les jeunes novateurs d’aujourd’hui, autant par justice que par convenance, devraient rendre grâce à leur aîné, au lieu de prodiguer à son théâtre de maladroits et puérils dénigrements. Mais, comme il l’écrivait un jour son ami : « Les enfants d’aujourd’hui ne savent plus remercier. »

Je n’essaierai pas, Messieurs, d’étudier dans le détail l’œuvre considérable d’Alexandre Dumas. Je n’aurais pour cette étude ni le temps ni l’aptitude nécessaires ; je vois d’ailleurs parmi vous des critiques justement renommés, qui ont mis en lumière toutes les faces de ce grand talent dramatique, avec une autorité, une pénétration et un charme rares. Je me bornerai donc à indiquer rapidement les évolutions qui se sont produites dans sa façon de comprendre le théâtre, et avec quelle souplesse ce merveilleux esprit s’est transformé et renouvelé.

Les deux premières pièces de Dumas fils, La Dame aux camélias et Diane de Lys appartiennent au genre romanesque. L’auteur s’y préoccupe moins de peindre les