Aller au contenu

Page:Académie française - Recueil des discours, 1890-1899, 2e partie, 1900.djvu/461

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de Bar-le-Duc, votre ville de famille, et comment elle n’eut de repos qu’après avoir décidé votre père, alors receveur des domaines, à solliciter sa nomination en pays lorrain. Vous ajoutez, non sans malice : « Si aux termes du Code l’épouse doit suivre son mari, en fait c’est le mari qui suit l’épouse. Sur cent fonctionnaires mariés, il y en a bien quatre-vingts qui finissent leur carrière dans le pays de leur femme. » Vous revîntes donc à l’âge des toutes premières impressions, dans votre terroir d’origine, dans cette vieille capitale du Barrois qui a donné à votre enfance des émotions si fraîches, à votre jeunesse de si gracieux thèmes de poésie, à votre maturité de précis et justes motifs pour vos tableaux de vie provinciale. C’est un coin bien particulier de la France que cette portion de la Lorraine qui touche à la Champagne, que ce pagus Barrensis qui va de la Marne à la Moselle. Ce n’est pas encore la frontière, mais c’en est l’approche, le premier morceau de notre marche de l’Est. Placée entre le versant du Rhin et celui de la Seine, comme à l’avant-garde de notre patrie, cette mince ligne de terre a vu naître dans un de ses villages, à Domrémy, le cœur de vierge où l’amour de la France a brûlé de la flamme la plus intense, cette Jeanne que votre compatriote et ami Bastien-Lepage a évoquée écoutant ses voix, dans une toile mémorable. Il lui a suffi, pour retrouver cette image héroïque en sa vérité, de copier une des filles de votre campagne et cette campagne elle-même. La nature ici n’est pas grandiose. C’est la terre des coteaux et des bois, de ces coteaux, comme s’exprime naïvement un vieux chroniqueur de Bar « où se récolte un vin bienfaisant et très ami de