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Page:Achille Essebac - Luc.djvu/249

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LUC
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le pouvoir — sans l’outrager, inviter l’enfant ignorante à détourner de ses flancs la joie désormais vivante d’avoir contenu les virils transports de son adolescence désirable.

Luc atterré de son œuvre se conformait d’avance à toutes les décisions de Julien ; non pas qu’il abandonnât aussitôt et sans courage celle qui d’un souffle venait d’embellir la sensibilité de son être caressant et passionné, mais il avait conscience du sacrifice nécessaire de cette sensibilité de gamin au respect de Nine, de ses hôtes et de Julien. Et Julien, d’ailleurs, qui venait de pardonner à l’amant, pouvait seul arracher l’amante au déshonneur.

Et c’étaient d’angoissantes minutes, celles où se débattaient entre les jeunes gens les graves intérêts désagrégés soudain par la fugue d’une juvénile attirance.

Un abîme semblait les séparer. Il paraissait qu’aucun accord possible ne les pût réunir et que leur situation jamais n’eût rencontré d’égale dans les prodigieux ondoiements de l’amour. Les concessions mutuellement acceptées, la presque froideur d’une telle rencontre dans la sérénité de ce paysage automnal et la bonhomie familière du pavillon, bravaient les décrets poncifs de l’honneur et foulaient les lois primaires du droit et de la propriété. C’est que deux âmes seules — en dehors de la glèbe irritable des corps — se rencontraient, dont la délicatesse peut surnager sur le flot brutal des revendications.

Luc aimait Julien, Julien adorait Luc.

Julien tenait en ses mains la peine horrible des deux enfants ! Qu’il se retirât d’eux ; l’un demeurait