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Page:Achille Essebac - Luc.djvu/96

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LUC

son petit protégé. Ce fut une folie de bonheur quand, arrivé rue Murillo, la comédienne lui fit connaître le secret jalousement gardé envers tous et que même Julien ignorait…

Lucet courut vite, en traversant le parc Monceau, à l’avenue de Villiers. Il parut rayonnant chez Julien, et Julien dévorait ce jeune visage animé par la prolixité des douces paroles d’une vie prodigieusement exubérante et jolie. Julien le laissait parler. Chaque mot embellissait leurs yeux et les illuminait de triomphe… C’était, cela, la réalisation de vœux longtemps caressés ; comme une apothéose où s’arrêtait la magnificence de leurs élans vers la beauté. C’était pour Lucet la prochaine renommée. C’était pour Julien le partage, sans doute, de cette juvénile splendeur de son ami, jalousement gardée ; mais ce partage allait doubler, décupler, centupler la grâce dont rayonnait déjà son être tout entier ; il pouvait bien en abandonner une part au grand public qui la demandait, puisque cette part lui devait revenir multipliée et glorifiée comme jamais il n’eût osé le pressentir.

Déah Swindor, Déah Swindor, la folle de génie, l’extravagante de beautés impossibles et cependant réalisées, la fée dont la présence et la volonté font jaillir le Rêve de son chaos enlizé de brume d’or et d’azur, Déah Swindor offrait son théâtre à Lucet. Lucet jouerait auprès d’elle, d’Elle ! Et les escarboucles éblouissantes dont est son front d’impératrice illuminé verseraient à torrents leurs clartés sur l’adolescent. Quand les rimes s’élèveront — harmonie déjà, mais plus harmonie encore, frôleuses de ses lèvres sonores — Lucet lui répondra. Leurs voix