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Page:Achilles Essebac - Partenza-vers la beauté.djvu/116

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PARTENZA…

Après un déjeuner inouï de parfaite tranquillité, au milieu de ces visions d’enfer, le funiculaire nous emmène à la station extrême après laquelle on doit gagner à pied le Cratère. Une fumée intense nous enveloppe, fouettée par le vent qui la rabat sur nous, chargée de vapeurs sulfureuses ; et de petites fleurs de neige tombent, si menues et si frêles qu’il faut s’étonner de les voir survivre à la violence du vent.

Mon guide me suit de loin. La fumée épaisse nous sépare presque constamment l’un de l’autre, et je devine le monde tellement petit et tellement loin au-dessous de moi, que l’isolement me plaît ainsi. Quand, par moments, les rafales suspendent leurs sifflements, il règne un grand silence, — le Silence, — large, large, infini, tel que je ne l’ai compris nulle part ailleurs. Maintenant la tempête chasse, avec des cendres menues et lourdes qui chatouillent la figure, une fumée compacte et tiède sous les picotements froids de la neige qu’elle entraîne. Je monte, bousculé par un vent alterné de glace et de feu, enfonçant jusqu’aux chevilles dans la cendre noire qui se soulève et vous envahit. Encore quelques pas très difficiles, aveuglé et étouffé par le soufre en vapeurs très denses et les poussières. J’arrive au trou béant sur le monde inférieur, où tourbillonnent les bourrasques. Mon guide est redescendu sans m’avertir et pendant quelques secondes je ne vois plus ni le ciel ni même le sol sur lequel je suis à demi enfoncé, rien que l’ouverture large comme un lac desséché, et profonde d’une profondeur stupéfiante que la fumée ne me laisse même