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Page:Achilles Essebac - Partenza-vers la beauté.djvu/199

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PARTENZA…

l’air pur, et les soupirs embaumés des eucalyptus, aux baisers, aux soupirs de là-bas…


L’obscurité est verte et bleue, avec des semis d’étoiles sans nombre. On devine les places aux grandes traînées blêmes immobiles sur Rome, au-dessus des palais et des dômes. Rien ne trouble la quiétude de cette terrasse où je suis, dominant toute la ville assoupie, voyant, au loin, les remous indécis des ondulations tour à tour éclairées et sombres d’où s’élève, au dernier plan, plus grandiose encore dans ses formes indistinctes, la vision dantesque de Saint-Pierre et du Vatican. J’accroche mes regards sur ces deux choses dont les masses confondues me semblent le Pôle de toutes les espérances, l’Axe colossal autour duquel gravite l’existence du Monde, où, géant, est enfoui dans un coin de son palais immense et muet le Vieillard frêle et diaphane dont les épaules se redressent sous ce poids plus formidable encore que la pesanteur matérielle du Globe : le fardeau des âmes et la raison d’être des corps…

Puis il me vient à l’idée que c’est bizarre, cet individu que je suis, accoudé là, seul, sur un mur de pierre très froid au contact des mains, bouleversé de songes écrasants et peut-être ridicules, rêvant en même temps à cette petitesse : les danses de ces gens dont les silhouettes passent l’une après l’autre derrière les baies illuminées, aux accords d’un piano, et songeant aussi que ce n’est pas la peine de faire ainsi les fous, puisque de tous ces bruits de voix et de musique il ne