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Page:Adam - L’Enfant d’Austerlitz (1901).djvu/441

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— Certainement mon Père ; et je me sens tout édifié par de si bons discours. Je m’en réjouis d’autant plus que j’ai peine, d’ordinaire, à réduire les rébellions de mon cœur qui s’insurge facilement contre la contrainte des doctrines. Cela me désole. Il faut que je châtie à tout moment mes inclinations libertines.

― Ne vous châtiez point tant. Connaissez-vous cet admirable chapitre de saint François de Sales, qu’il intitule : De la douceur envers nous-mêmes ? Écoutez-le parler : « Je dis aussi que nous nous punissons nous-mêmes plus utilement de nos fautes par une douleur… tranquille… (Le Père leva le doigt devant son œil soupçonneux)… tranquille et constante que par un repentir passager d’aigreur et d’indignation. » Méditez cette belle et profonde sagesse, monsieur. On enseigne trop souvent notre sainte religion sous des couleurs atroces. L’Église est une mère, et non pas une marâtre. Elle n’ignore rien de la force du démon ni de la chétivité du fidèle. Dans la vertu comme dans le reste, « une sobriété modérée et toujours égale est préférable à une abstinence violente et mêlée de certains intervalles d’un grand relâchement ». Telle est la règle que vous trouverez en honneur dans notre compagnie, monsieur, au cas que vous la fréquentiez.

― C’est mon plus grand désir, mon Père ; et je vous supplie d’accueillir ma pétition, que je vous présente ici.

Omer tira le pli de son gilet et l’offrit sur le flanc de son chapeau. Le Père Ronsin prit le papier, le transmit à son servant, et dit :

― Puisque nous semblons d’accord, votre demande sera soigneusement examinée, monsieur.

À l’air de son oncle, un peu moqueur envers le jésuite, Omer comprit qu’il avait parlé congrûment, sur le ton nécessaire, des « rébellions de son cœur », de ses « inclinations libertines ». Il n’avait point manqué de dire cela