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Page:Adam - L’Enfant d’Austerlitz (1901).djvu/498

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voix sourde et modulée. ― j’incline à le croire. Cela suffit pour que vos paroles me plaisent…, et que vous ne me déplaisiez pas. Je n’ai guère le cœur aux amusements. Vous désirez que je reste en votre compagnie quelques minutes : j’y resterai donc. Votre jeunesse et votre air me laissent croire que je n’ai rien à craindre de vous… hélas ! Oui, mon désespoir est sans bornes. L’un de ces malheureux me doit sa perte ; je le fis rencontrer avec plusieurs de mes amis, anciens officiers de l’empire, dont il écouta les conseils. ― connaîtriez-vous, par hasard, le capitaine Lyrisse ? Interrogea-t-il, ravi. ― celui qui est en Espagne ?… certainement ! Je l’ai mis en relation moi-même avec Lefèvre, Pommier, Bories, au restaurant du roi Clovis, dans la salle d’escrime. ― le capitaine Lyrisse est mon oncle… ― ah ! Omer jugea la conquête facile ; son être en désir palpita. Il remerciait son éloquence révolutionnaire. Immobile devant lui, la femme posait deux ou trois questions pour vérifier leur commune sympathie à l’égard de l’exilé. Puis elle se tut. Ils inspectaient leurs yeux, et sondaient leur franchise, effrayés un peu de se comprendre réunis par les influences d’une idée géante et mortelle. Elle les menait. Inconnus l’un de l’autre, ils s’y dévouaient également, au moyen de la parole, au moyen de l’amour. Mais tout à coup Omer supposa que la passante se livrait aux conspirateurs pour les trahir. Ne s’attribuait-elle pas un faux rôle ? Peut-être ne connaissait-elle aucun des soldats incriminés. Peut-être se préparait-elle surtout à le séduire, en se vantant de relations avec des gens dont elle ne savait rien que par ouï-dire. Peut-être prétendait-elle ainsi se rendre plus intéressante et fatale. Sans doute usait-elle d’un pur moyen de galanterie… alors