Aller au contenu

Page:Adam - L’Enfant d’Austerlitz (1901).djvu/516

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans le Jardin des Oliviers : devant sa mère, il se fût incliné, les bras en croix, comme devant la vision du calice que le père ne détourne d’aucun de ses enfants.

Le général se fit annoncer : la calèche allait conduire la malade chez le docteur. Omer ne fut pas invité à les suivre. Il en conclut que l’oncle voulait affermir son influence sur maman Virginie, soit par la nomenclature des richesses inscrites à son testament, par le texte du legs, soit par le récit des prouesses qui le maintenaient bien en cour sous le ministère de la Congrégation. Sans doute, il réussirait parfaitement à la persuader ; il obtiendrait d’elle une confiance inutilement sollicitée par un fils dont elle récusait sans examen les craintes : elle se gaussait de l’entendre prévoir un mariage agencé entre l’habile Augustin et la naïve Denise.

Pendant leur absence, Omer mesura la solitude absolue de son esprit qui ne s’alliait à nul autre. Sa mère elle-même se défiait ; sa sœur le haïssait ; l’oncle Héricourt le jouait ; le comte le maniait comme un instrument d’intrigue ; Édouard l’aimait par reconnaissance, rien que par ce motif, et s’occupait uniquement de marivaudage ; quant à Émile, ses devoirs de lieutenant l’avaient rappelé dans sa garnison, loin de Paris. « Il faut se résigner à Dieu… Prions ! » se dit Omer. Mais il n’écoutait pas les mots des oraisons qu’il prononçait à demi-voix.

D’abord superbe et triste, l’aspect du Christ aux grandes boucles se transfigurait bientôt, en son imagination, pour revêtir, sans toutefois cesser d’y transparaître, la face changeante d’Aquilina… De jeunes soldats ardents avaient, dans cette beauté même, incarné l’idéal de leur héroïsme libéral et patriotique. Cet idéal était un dieu sans doute, un de ces dieux à la façon romaine de la Vénus Victrix… Alors lui revint dans la mémoire cette parole étonnante du Père Anselme qu’il