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Page:Adam - L’Enfant d’Austerlitz (1901).djvu/520

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questionna Denise, étonnée. ― quand on part en campagne, ma chère, il est de règle d’écrire son testament… ― est-ce donc la guerre ? ― sans doute… on ne double pas, pour de simples manœuvres, les troupes du corps d’observation sur la frontière. Praxi-Blassans va préparer le bal au congrès de Vérone ! ― ciel ! Aussitôt sa figure se contracta, blêmit. Elle laissa tomber le petit chien, qui poussa des cris aigus, étranglés par l’angoisse et le désespoir, puis se réfugia sous un guéridon. ― eh bien, qu’est-ce ? Denise ! Demanda sa mère. Quel petit cœur sensible ! Crois-tu, Aurélie ?… mais elle est aussi pâle qu’une morte ! Immobile, le général examinait attentivement le trouble de sa nièce. Elle toussait, afin de faire paraître une raison de cacher son visage dans le mouchoir. L’oncle Augustin mit ostensiblement la main, sur les décorations qui lui couvraient le cœur : ― hé quoi, Denise ?… hé quoi ?… une fille de militaire !… allez-vous avoir vos vapeurs comme une petite bourgeoise de la rue Saint-Denis, quand son mari va monter la garde un jour d’émeute ! Omer remarqua très bien qu’il accommodait le ton de ses paroles au simulacre d’une profonde émotion malaisément contenue. Le général tira son mouchoir aussi, et s’essuya les tempes, de jolies tempes creuses, hâlées, d’où se projetait, droit, le profil d’une face aux yeux ardents, au nez courbe, à la bouche nue, rouge, arquée, retroussée, mobile et riche en significations. ― ah ! ― reprit la mère, ― ma petite chérie, ton oncle en a vu d’autres !… la providence garde ceux qui se dévouent à Dieu et à leur roi !… mais soudain Mme Héricourt parut gênée par une