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Page:Adam - Le Serpent noir (1905).djvu/358

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K • ` LE sunrnntr NOIR- 353 bouillons deu gouffre. Ses accents se confondirent bientôt avec ceux des eaux et du vent, comme ceux du ténor se confondent avec les sonorités d`un or- chestre en délire. ll me parut entendre une seule, une longue objurgation de fureur et de désespoir pro- férée par les éléments, la terre d’Armor, et leur fille. N’était-ce pas le vieil esprit, la vieille morale enra- cinés dans la terre bretonne que je voulais arracher de cette âme? N’était-ce pas afin de la protéger, eût dit un poète, que la mer et la tourmente se liguaient avec cette créature pour empêcher mon œuvre d`in- novation? Le duel me plut. Je me sentis apte a vaincre. Mon esprit inventa rapidement les subter— fuges de langage propres à convaincre ma victime de se dépasser, de permettre qu’on immolât son amour vulgaire sur l’autel d’un amour plus rare 'et meilleur. —- Certainement — repris—je tout a coup : — cer- tainement votre cousine est folle. Proposer ai une femme comme vous d’abdiquer sa personnalité! — D’abdiquer ma foi!... Ce n’est pas seulement ` ma vie terrestre, c’est ma vie éternelle qu’elle exige... Et elle connait mes sentiments la—dessus. Elle veut me soustraire en même temps mon amour · et ma foi! ` -— Vous ne démentirez pas votre raison même ° d‘exister! Vous ne résignerez pas tous les droits de` `Pindividu. Le monde considérerait cela comme une marque de faiblesse extraordinaire... Elle ne soupçonna pas mon arrière-pensée, et me _ jugea converti. Sa haine exclusive pour madame Hé- lène lui_ permettait a peine de se souvenir qu’à Con- carneau j’avais, moi-même, exposé la these du 20.