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Page:Adelswärd-Fersen - Le baiser de Narcisse, 1912.djvu/41

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CHAPITRE VI



Leur devoir était de prier, de protéger ; il fallait aussi qu’ils consolassent. Ces prières, ces appuis et ces consolations résidaient dans leur beauté même. Lorsque, prosternés sur les dalles de marbre et devant les idoles de bronze, ils suppliaient, en couvrant la pierre froide de baisers brûlants, l’Adonis d’accorder le bonheur à la terre ; lorsqu’ils recueillaient les esclaves, les captifs, les vieillards et la muette souffrance des bêtes ; lorsqu’ils allaient près des malades ou qu’ils ensevelissaient les morts, leur présence, leur jeunesse, leur splendeur semblait une perpétuelle offrande. Devant ces adolescents l’on oubliait l’habitude terne de vivre. Celui d’entre eux qui passait évoquait ce qu’on aurait dû être. Et l’on pensait aux héros des légendes dont Zeus s’énamoura.

Milès n’avait point été désorienté par cette vie nouvelle. On aurait dit, à le voir s’exercer aux litanies en brûlant les baguettes