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HISTOIRE

le douzième arrondissement parut une menace sérieuse, et le préfet de police répondit à l’avis qui lui en fut donné, conformément à la loi, par une défense formelle. À ce refus, la commission du banquet, composée de MM. Marie, Crémieux, Pagnerre, Garnier-Pagès, et qui avait pour président M. Boissel, député, pour vice-président M. Poupinel, lieutenant-colonel de la douzième légion, répondit à son tour par la déclaration suivante

« Vu la sommation de M. le préfet de police ;

La commission du banquet réformiste du douzième arrondissement s’est réunie, et, considérant que, en fait, nulle autorisation n’a été sollicitée, que M. le préfet a bien voulu confondre une déclaration pure et simple du lieu et du jour du banquet avec une demande en autorisation, qu’on n’avait ni à demander ni à refuser s’appuyant sur les lois de 1831 et 1834, qui ne prohibent point les réunions accidentelles, sur les déclarations formelles de l’orateur du gouvernement dans la discussion de ces lois, sur le récent arrêt de la Cour de cassation et sur la pratique constante du gouvernement ;

La commission décide à l’unanimité qu’elle regarde la sommation de M. le préfet de police comme un acte de pur arbitraire et de nul effet. »

La question se posait ainsi de la manière la plus explicite entre le pays légal et le gouvernement. Il n’y avait plus d’équivoque ni de temporisation possible. Aussi, à la Chambre des pairs, M. d’Alton-Shée ayant, dans la séance du 18, sommé le cabinet de dire si c’était avec l’autorisation du gouvernement qu’avait agi le préfet de police, M. Duchâtel répondit fièrement par l’affirmative. Il se fondait sur la loi de 1790, soutenait le droit du ministère d’autoriser ou de refuser, selon les circonstances, une réunion politique, déclarait que le pouvoir ne céderait point dans un moment où une telle réunion présentait des inconvénients graves, et qu’il la ferait disperser par la force si l’on avait la folie de braver une interdiction parfaitement légale.