Aller au contenu

Page:Aicard - L’Illustre Maurin, 1908.djvu/485

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
467
L’ILLUSTRE MAURIN

elle, toujours, au point d’en être brutal ! Était-ce Dieu possible ? Et comment en douter, quand cette innocente, si jeunette, le lui disait en pleurant toutes les larmes de son corps ! une enfant sans défense, pechère ! une orpheline !

— Adieu ! dit Tonia brusquement. Le bon Dieu te vengera ! adieu, que j’ai affaire… Mais ce Maurin, où est-il à présent ? par où est-il passé ? le sais-tu ?

L’œil de la jolie enfant se leva sur la Corsoise. Il était sec, et le regard froid. Elle sut donner des renseignements précis :

— Je l’ai épié d’ici, tant que j’ai pu, à travers le bois. Il a traversé le Pas de la Masque. Il a remonté la mussugue en face ; voyez là-bas ; et il doit être là, sur le plateau où se trouve le Puits des Arbouses, vous savez bien ?

— Oui, dit Tonia haletante.

— Il m’a paru qu’il s’asseyait tout à coup. Il aura déjeuné dans cet endroit. C’est là qu’il est… pour sûr…

— Adieu ! adieu, petite !

Tonia, indignée, s’exaltait à l’idée de venger la pastresse, mais, en réalité, une jalousie aux dents acérées lui mordait le cœur.

Où allait-elle, courant ainsi, se déchirant aux ronces, sautant de roche en roche, tirant au plus court, laissant les chemins faire seuls leurs détours ?

Fanfarnette regardait Tonia s’éloigner. Quand elle la vit gravir la colline d’en face, elle se remit à tresser de jolies couronnes de feuillage et à fredonner gentiment :

 
« Les femmes ne portent pas moustache,
Morbleu, Marion !
Les femmes ne portent pas moustache