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Page:Aicard - L’Illustre Maurin, 1908.djvu/500

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L’ILLUSTRE MAURIN

sectaires qui consiste à croire que le fait seul d’être affilié à un parti confère des vertus spéciales.

Derrière Fanfarnette, il y avait Grondard, — il le sentait, il le devinait, le voyait. Il n’est pas nécessaire de savoir nommer les causes de son mal ou celles de sa joie pour souffrir ou jouir. Autrement que serait la vie des bêtes ?

Maurin, sans qu’il sût se l’expliquer, venait de mettre en doute la victoire future du Bien sur le Mal.

Il se prenait à croire tout à coup au triomphe définitif des Grondard sur les Rinal. Du haut rêve de justice dans lequel il avait vécu, il tombait lourdement dans l’injustice de la réalité, comme l’acrobate qui, enlevé par une mongolfière, lâche son trapèze au moment où il croyait monter au ciel — et s’enfonce, de tout son poids, multiplié par l’effroyable vitesse, dans la fange d’en bas.

Il n’avait attaqué, il n’avait vu jusqu’ici que les défauts d’un mécanisme qu’il jugeait perfectible et qui s’appelle l’état social, sans faire la part de la malice humaine, sans incriminer les hommes qui sont irrémédiablement avides, fourbes, intéressés. Les hommes, il avait cru les connaître et les juger, lorsque, en vérité, il ne les avait vus et blâmés que dans les institutions, non pas dans la nature humaine, c’est-à-dire dans la cause profonde. Bref, il avait cru la société artificiellement mauvaise et les hommes naturellement bons.

Le généreux Maurin venait de découvrir l’indéfectible égoïsme, source inépuisable de toute perfidie. Il ne s’était jamais douté de la toute-puissance de l’intérêt, seul roi du monde. Il avait une âme aimable d’enfant ; il était l’individu qui vit indépendant loin des foules, mais dont chaque geste est une pensée