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Page:Aicard - Maurin des Maures, 1908.djvu/261

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MAURIN DES MAURES

but longuement. Le liquide tombait dans sa gorge avec un grand bruit de source à l’ombre, qui était comique au milieu du grand silence de midi, en plein soleil.

« Il reprit :

« — On ne l’aimait pas, allez, dans le pays ; il était détesté des gens comme des bêtes, mais on avait peur de lui, et on le laissait tranquille, dans le fumier de sa maison où jamais n’entrait personne.

« Un jour, Latrinque, un travailleur de terre comme moi, le père de celui-là même qui vient de passer si fier sur sa çarette, arriva à la maison pour me parler et il me dit :

« — Magaud, je viens te demander conseil.

« Je lui dis :

« — Parle. »

« Il me dit :

« — Écoute ! »

« Et voilà ce qu’il me conta :

« — Magaud, tu sais le Canonge ?

« — Oui.

« — Eh bien, il est entré chez moi ce matin et il m’a dit comme ça :

« — Latrinque, je me fais vieux et même beaucoup vieux ; j’ai de la terre, tu dois le savoir, et j’ai de l’argent. Eh bien, si tu le veux, tout est à toi. »

« — Alors, moi, je dis à Latrinque :

« — Que chantes-tu là ? tu radotes ! »

« Latrinque me dit :

« — Attends un peu. Voici l’idée du Canonge. Le Canonge m’a dit :

« — Latrinque, je me fais si vieux que je ne peux plus aller au village chercher ma nourriture…