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Page:Aicard - Maurin des Maures, 1908.djvu/286

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MAURIN DES MAURES

— C’est pas l’embarras : un pin fait un pin, et un chêne fait un chêne… Tu es ma race, quoique tu me paraisses tenir un peu de ta mère pour la lecture !

Tout à coup, sa physionomie s’attrista :

— C’est dommage que tu m’as l’air de partir comme pour être une fameuse petite canaille !… Mais ça finira mieux que ça n’a commencé ; Dieu t’avait abandonné, pechère ! Eh bien ! fit-il en se désignant du doigt, eh bien, tu le retrouves !

Puis, après un silence :

— Je ne te perdrai pas de vue, bougre d’âne ! Et si tu ne marches pas droit, gare à tes côtes ! Tu connais mon poignet, hein, à cette heure ?… Je n’entends pas que tu finisses au bagne ! ça me dérangerait beaucoup.

Césariot, en ce moment, rongeait l’os le plus résistant du lièvre.

Il le cassa tout à coup entre ses dents. Alors, Maurin s’écria, enthousiasmé :

— Ce n’est pas pour de dire, mais entre ta mère et moi, noum dé pas Dioù ! nous t’avons f…ichu dans la gueule deux rangées de dents qui feraient le bonheur d’un chien, qué, mon homme !… Dommage, que d’après ce que je vois, pour le cœur, je ne sais pas de qui tu tiens, et peut-être, malheureusement, tu l’as dur comme le reste.

À ces mots : « ta mère et moi », Césariot avait relevé la tête et il regardait Maurin attentivement :

— Voui, voui, je te comprends ton genre de folie, répliqua avec indulgence le bon Maurin, à ce regard inquiet. Et je n’ai dit que ce que j’ai voulu dire… Vois-tu, triple imbécile que toi tu es, je te répète qu’on a toujours une mère et qu’il ne faut jamais lui faire contre.