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Page:Aicard - Maurin des Maures, 1908.djvu/303

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MAURIN DES MAURES

toutes tu me plais ! mais je ne veux pas les chagriner, pecaïre !

Elle se dégagea d’un mouvement violent et lui porta maladroitement un coup de son fin stylet, au hasard, comme elle put et de haut en bas. Si prompt qu’il eût été à se reculer, il eut la main égratignée du poignet à l’ongle. Il regarda tranquillement sa blessure.

— On dirait, fit-il, une piqûre d’argeria (genêt épineux) ou d’agulancier (églantier). Tu es une fleur qui pique, mais qui sent bougrement bon !

Elle le regardait, surprise de lui, et malgré tout charmée ; déjà elle regrettait son geste de colère.

— Console-toi, dit-il, ça n’est rien. En frappant comme ça, tu ne pouvais pas me faire grand mal. Les agulanciers piquent et les vrais Corses aussi, — mais mieux que ça. On voit que tu as depuis longtemps quitté ton île. Attends que je t’apprenne le jeu, quoi qu’à dire vrai il ne me plaise guère !

Il lui saisit les deux poignets, un dans chaque main ; il fit alors, du poignet droit jusqu’à la main de Tonia qui tenait le stylet, glisser sa main fermée en anneau coulant, et prit l’arme terrible sans peine : « Comme on cueille une figue… une figue mûre », dit-il.

Elle s’étonnait de lui toujours davantage, et de plus en plus l’admirait. Il le voyait bien et il souriait.

— Tiens ! fit-il, jamais de haut en bas ! Il ne faut frapper que comme ceci :

Et abaissant l’arme serrée à plein poing, il porta un coup dans le vide, d’avant en arrière.

— À ton tour, essaie.

Gravement il lui rendit le stylet.

Elle eut envie de se jeter à son cou, mais elle se con-